Épisode 1 : De l’apparition de la tumeur au diagnostic

Lorsqu’au printemps 2005 j’ai annoncé que je m’engageais dans une démarche de conversion à l’Agriculture Biologique, j’ai eu affaire à des sourires narquois de mes confrères paysans. Pourtant plusieurs éléments m’avaient décidé à franchir le pas :

  • une pression régulière de la part des conseillers (technico-commerciaux) pour me contraindre à utiliser des pesticides
  • régulièrement il fallait changer de molécules pour avoir une bonne efficacité sur le problème visé, preuve que la nature s’adaptait et/ou que sans le savoir nous sélectionnons des résistances.
  • à coté de chez moi des écoliers n’avaient plus le droit de boire l’eau du robinet
  • une hausse annoncée du cours du pétrole qui présageait une hausse des engrais azotés dont est extrêmement gourmande l’agriculture intensive. En effet il faut du gaz pour faire des engrais azotés, et le prix de ce gaz est indexé sur le prix du pétrole. Entre mars et septembre 2005 le prix du baril de pétrole est alors passé de 25 à 50 dollars....

J’ai donc signé un Contrat d’Agriculture Durable (CAD) pour 55% de mon exploitation. L’année suivante (2006) j’ai engagé le reste de mon exploitation (45%) en conversion. Je ne me voyais pas pratiquer les 2 modes de cultures simultanément. J’ai d’ailleurs signé un des derniers CAD. J’ai donc continué à utiliser des pesticides jusqu’en septembre 2006 ; la conversion du reste de ma ferme ne débutant qu’en octobre pour les semis d’automne. J’ai su plus tard qu’il se disait que dans mon village il y allait avoir une exploitation à reprendre prochainement..... (sourire). Puis en 2007 j’ai revendu mon pulvérisateur n’en ayant plus besoin, ceci amènera une anecdote ultérieurement.

Fin août 2016 : un matin je m’aperçois que j’ai une petite boule dans l’aine. Devant partir en vacances une semaine plus tard, j’ai préféré consulter mon médecin traitant. Celui-ci a fait faire une analyse de sang dont les résultats n’ont rien donné de probant. Vers le 20 septembre, constatant que le petite boule avait grossi, je suis retourné voir mon médecin. Celui-ci étant en congé, c’est son remplaçant qui a prescrit une échographie, échographie qui n’a rien donné de précis à part une boule... Je suis donc retourné voir mon médecin qui était revenu de vacances. Il a constaté l’augmentation de volume et a décidé de m’envoyer voir un chirurgien. Le temps ayant passé depuis l’échographie, j’ai donc essayé de prendre rendez-vous auprès de ce chirurgien. Mais comme nous étions jeudi veille de Toussaint, il n’y avait personne pour raison de congés. Dix jours plus tard, j’ai pu avoir un rendez-vous pour le 23 novembre....

9 décembre : le chirurgien m’a reçu et m’a fait faire une IRM, qui s’est transformée en scanner. Et toujours aucun résultat probant.... Il a alors été décidé de faire faire une biopsie le 13 décembre suivant. Il faut savoir qu’une biopsie est un prélèvement de chair de la tumeur pour en faire une analyse. Ce n’est pas très douloureux, et cela a pu se faire sous anesthésie locale.

18 décembre : le résultat d’analyse du prélèvement est tombé. Il s’agissait d’un lymphome qui est une sorte de cancer... Le chirurgien m’a alors dirigé vers une confrère oncologue (cancérologue) pour un rendez-vous le 21 décembre suivant et a pris rendez-vous le même jour pour examen TEP. Le principe de cet examen est l’injection de glucose radioactif et passage dans un appareil de genre scanner une heure après l’injection. Cela a pu démontrer que la tumeur était localisée et non diffuse.

4 janvier : j’ai de nouveau rencontré l’oncologue qui m’a expliqué le résultat du dernier examen. Elle m’a aussi dit que mon lymphome n’était très courant, mais pas pour autant incurable. Par contre, elle préférait que je consulte un spécialiste à Villejuif, spécialiste avec qui elle travaille en réseau. Mais ce 4 janvier, ce spécialiste était en vacances. Le 12 janvier suivant, j’ai reçu un appel de sa part m’annonçant avoir obtenu un rendez-vous pour le 19 janvier.

Ce cancer est aussi appelé Hémopathie maligne est considéré depuis juin 2015 comme une maladie professionnelle agricole liée aux pesticides. J’ai déposé en accord avec mon médecin traitant une demande de reconnaissance de maladie professionnelle auprès de la MSA (liste des tableaux sur www.inrs-mp.fr ).

 Épisode 2 : les tribulations médicales se poursuivent jusqu’au début du protocole de soin.

19 janvier : Je me suis donc rendu à Villejuif ce jour là. Il faut savoir que l’hôpital Gustave Roussy à Villejuif est un complexe énorme. En plus d’hôpital, il fait université et centre de recherche, le tout dédié exclusivement aux cancers. J’ai donc rencontré, après avoir fait les démarches administratives, ce spécialiste. Cet homme est quelqu’un de très humain, pas hautain et abordable, sans langue de bois apparemment. Je dois dire que c’est plutôt surprenant et agréable. Son examen de mon dossier médical ne lui a pas permis de cibler le traitement adéquate. Il lui manquait une analyse de sang pour la détection et la concentration d’un marqueur spécifique. Une analyse de sang a alors été faite dans la foulée et sur place. Un rendez vous a donc été pris pour le 26 janvier. Entre temps le résultat de l’analyse sera connu et un traitement sera décidé en concertation avec ses confrères. Il semble fort possible qu’un traitement à base de comprimés me sera administré, mais surtout, il me dit que dés le rendez-vous du 26 janvier un traitement me sera administré.

26 janvier : Nouveau rendez-vous à Villejuif . Le spécialiste me certifie avoir déterminé le traitement à m’administrer au vu du résultat de l’analyse de sang effectuée une semaine plus tôt. Il me propose de me faire suivre de nouveau sur Auxerre pour des raisons pratiques d’éloignement, ce dont je suis d’accord. Il faut savoir que se rendre à Villejuif nécessite de chez moi 2h15 à 2h30 de route pour être vers 10h du matin. En effet c’est en pleine période d’embouteillage. Alors que le retour ne prend que 1h30....
Le spécialiste me prescrit un traitement pour 7 jours pour faire diminuer de taille la tumeur.

Appréciation personnelle : me faire déplacer pour si peu est une perte de temps pour les deux parties. Un simple appel par téléphone aurait suffi si dans la foulée un rendez-vous sur Auxerre était calé. De plus faire déplacer une voiture roulant à l’énergie fossile alors que cela était en pleine période de pic de pollution n’est pas forcément judicieux. Mais bon....

Dés le 27 au matin, j’ai appelé Auxerre pour prendre rendez-vous, Il m’est alors proposé le 3 février comme date. Mais je n’ai pu accepter cette date, car ma compagne devait aller à un rendez-vous médical personnel éloigné ; et elle avait accepté la date du 3 février pensant que mes rendez vous médicaux importants seraient achevés. De plus, elle ne souhaitait pas voyager seule.
Je n’ai donc pu obtenir que la date du 6 février. Et toujours pas de début de protocole...

Un petit bilan intermédiaire :
18 décembre : verdict de la maladie
6 février : premier rendez-vous pour mettre en place le traitement

Et il paraît que plus un cancer est pris tôt, meilleurs sont les chances de guérison ….

Prochain épisode : rendez vous du 6 février et suivants

Anecdote de ma période conventionnelle :
Un automne j’avais commandé, à ma coopérative agricole, de la semence d’escourgeon avec un traitement de semence classique. Lors de mon déplacement pour récupérer ma commande, je n’ai pu avoir que de la semence traitée ’’gaucho’’ car il n’y en avait pas d’autres … on me l’a quand même faite au même prix que la semence classique. Mince consolation...

Pour finir avec le sourire :
un extrait d’un dialogue de Michel Audiard du film ’’Le cave se rebiffe’’

« Quand on mettra les cons sur orbite, t’as pas fini de tourner. »

 Épisode 3 : préparation de la première chimiothérapie.

6 février : je rencontre de nouveau la cancérologue d’Auxerre que je n’ai pas vue depuis le 4 janvier...Elle m’annonce que le traitement est en fait une chimio par perfusion. Personnellement cela n’est pas le plus important, comprimé ou perfusion ce n’est pas du paracétamol de toute façon. Le plus important est que l’on commence le traitement.
Mais cela ne se fait pas comme ça. Il faut pour cela faire une échographie cardiaque. Rendez- vous est donc pris pour le 8 février. Il faut aussi poser une sorte de boitier (catheter) relié à la veine cave dans la poitrine pour brancher la perfusion . Rendez vous est donc pris le 10 février. Ensuite un rendez vous est pris pour préparer le 1ere séance le lundi 13 en fin de matinée. Et dernier rendez vous pris le 14 à partir de 11h du matin pour la séance de chimio qui va durer une bonne partie de l’après-midi car si j’ai bien compris il y a plusieurs perfusions correspondant chacune à un produit spécifique.

8 février : rendez vous pour l’échographie cardiaque. RAS à part que le cardiologue qui me demande pourquoi je viens le voir ; me signale qu’il constate de plus en plus de lymphome....

10 février : rendez vous pour la petite intervention chirurgicale de pose de boîtier. Première surprise : l’intervention aurait été annulée. L’infirmière me voyant surpris me demande pourquoi. Je lui explique que j’ai reçu un appel téléphonique 48h plus tôt me confirmant l’intervention. De plus vu l’objet de l’intervention et la séance de chimio du mardi suivant, je ne voyais pas pourquoi elle serait annulée. Elle me dit que vu comme ça, en effet il y avait aucune raison d’annulation. L’installation dans la chambre se fait, puis l’infirmière vient pour un rasage de la zône d’implantation. Elle me demande pour quoi je suis la. Je lui explique. Sa réaction : ’’qu’est-ce qu’ils attendent pour commencer le traitement ?’’ ma réponse : ’’c’est une excellente question. Je me pose la même question’’
Départ au bloc pour une intervention avec anesthésie locale. Le chirurgien explique à tous le principe de l’intervention qui consiste à la pose du boîtier et le relié à la veine jugulaire (et non pas la veine cave). Retour en chambre après une radio de contrôle. Comme il est déconseillé de conduire après une anesthésie même locale, il est prévu que l’on vienne me chercher. J’avais renseigné une fiche de pré-admission pour cela ou était noté un numéro de téléphone de la personne à joindre. Mais vu que quelqu’un a annulé l’hospitalisation, la fiche a été détruite. Et vu que je n’avais pas pris mon portable, pensant ne pas en avoir besoin et que je n’ai pas ce numéro en tête cela devient compliqué. Mais dans la salle d’attente il y a d’autres personnes dont un jeune qui joue avec son portable. Je demande donc à ce jeune s’il a bien une connexion internet, ce qu’il confirme. Ainsi je peux donc récupérer le numéro en question. Et pourtant c’est vrai.....

Anecdote de ma période conventionnelle :
Un printemps je voulais commander, à ma coopérative agricole, de la semence de tournesol avec un traitement de semence classique et non pas avec un traitement au régent (néonicotinoïdes). Le technico-commercial me répond qu’il n’en a pas à proposer. Cette fois la j’ai répondu tant pis, je vais aller voir ailleurs. Connaissant un autre fournisseur j’ai pu trouver ce que je cherchais. Combien de paysans dans le même cas, on néanmoins pris ce que l’on leur imposait ? Mystère ….

Pour finir avec le sourire :
un extrait d’un dialogue de michel Audiard du film ’’Les barbouzes’’

« Quand les types de 130 kilos disent certaines choses, ceux de 60 kilos les écoutent. »

 Épisode 4 : les premières chimio

13 février : Rencontre avec la cancérologue pour préparer la première chimio du lendemain. Surprise : contrairement à ce qui avait été annoncé à Villejuif, ce n’est pas un traitement pas comprimés qui va m’est prescrit, mais une chimiothérapie injectable.
Personnellement, cela m’importe peu, le plus important est que cela donne un résultat... par contre, les séances d’injection vont être longues, très longues même. En effet, il y a dix poches de produits à m’injecter. Ceci veux dire qu’une grande partie de la journée va être nécessaire... Chaque séance de chimio devra être précédée par une prise de sang pour un bilan sanguin. Ce bilan sanguin décidera ou non si la séance de chimio se réalise ou pas.
La cancérologue me met en garde contre les effets de ce traitement tels que nausées, constipation, aphtes entre autres. Deux ordonnances pour prévenir ces éventuels méfaits me sont prescrites. On me met en garde contre les risques d’une septicémie, en conséquence de quoi, une de ces 2 ordonnances m’est prescrite pour une prise de sang pour tout état de santé anormal. J’ai droit ensuite à une visite des salles d’injection. Vu la durée totale de ma séance, je réserve un des 4 lits ce qui va nécessiter de me présenter dans les premiers pour avoir une chance de disponibilité. Ces 4 lits sont chacun dans une chambre individuelle. Le reste étant une salle commune avec des fauteuils individuels.

14 février : j’arrive donc à 8h30 par mes propres moyens. Je m’installe dans une salle. On me pose un kit stérile d’injection qui est en fait une aiguille d’injection reliée à un système de tuyaux avec une vanne 3 voies pour changer de poche. 12H30, le plateau repas arrive, on va pas dire que c’est génial mais cela se laisse manger... fin de la séance de chimio : 16h30. Retour à la maison toujours par mes propres moyens à 17h00. Bilan : je suis fatigué, les traits tirés mais sans plus.

15 et 16 février : après une nuit calme et profonde ; pas de réelles nausées, mais contrairement à ce qui m’était annoncé, je ne suis pas constipé. C’est même le contraire, j’ai une diarrhée qui me fait penser à une gastro entérite gazeuse. Les deux jours sont longs, le 16 février au soir la diarrhée commence à s’estomper. OUF ! Il est très compliqué de faire quoique ce soit pendant ces deux jours. En effet, on est vaseux, on somnole souvent, voir on dort carrément ; il est compliqué de se concentrer longtemps sur quelque chose. Les jours suivants cela va en s ’améliorant. Une petite forme revient progressivement. J’arrive à travailler sur mon exploitation, certes à mon rythme, mais à travailler quand même.

27 février : premier rendez-vous bilan de la première chimio afin de préparer la séance suivante. La cancérologue constate la même chose que moi : la tumeur a diminué fortement de taille (75%). Ceci est très encourageant car cela laisse penser que le traitement fonctionne. Une nouvelle ordonnance m’est prescrite pour lutter contre la diarrhée.

La séance prévue le 8 mars est reportée au 13 mars : 2e séance de chimio. Arrivée à 8h30, encore 10 poches, retour vers 17h00. RAS à part qu’une nouvelle fois j’arrive le premier ou presque et je pars le dernier. Et ce sera à chaque fois comme ça semble t-il... la diarrhée n’est plus vraiment là mais c’est pas forcément normal pour autant. Par contre j’ai le système digestif barbouillé et cela va être comme ça les jours d’après chaque séance....

20 mars : nouvelle consultation auprès de la cancérologue. Nouvelle diminution de la tumeur qui a maintenant régressé de 90% environ.

3 avril : 3e séance de chimio, même traitement, mêmes effets....

Bilan à mi traitement : globalement, une grosse fatigue se traduisant par des nuits de profond sommeil, souvent un poil trop courtes à mon goût. Un besoin de sieste après le repas du midi. Il m’est arrivé de travailler 4 jours d’affilée sur mon exploitation. Mais les 3 autres jours suivants, un gros besoin de repos, de sommeil s’est fait sentir. Autre constatation surprenante : l’état de santé, de forme est meilleur lors de périodes ensoleillées que par temps de pluie. Tout ceci doit vous permettre de comprendre pourquoi le long temps passé entre l’épisode 3 et 4. Pour mon exploitation, je suis à jour dans mon travail, même si je n’ai pu tout réaliser en temps en en heure, malgré avoir fait appel deux fois à de l’aide...

 Épisode 5 : fin de chimio et anecdote croustillante !

Petit retour en arriére : le 19 mars, je reçois un courrier en Accusé de Réception daté du 17 mars. Ce courrier est envoyé par la Mutualité Sociale Agricole de Dijon. Il m’apprend que ma demande de reconnaissance de maladie professionnelle liée aux pesticides a été acceptée. Sincèrement, je ne pensais pas que ce serait si rapide, si simple, si facile. J’ai cependant eu la visite le 16 février d’une responsable de ce genre de dossier basée à Auxerre, accompagnée d’une femme Médecin Conseil venant de Dijon. Par chance j’avais gardé mon cahier d’enregistrement des pratiques du temps ou j’étais encore en agriculture conventionnelle. J’ai pu ainsi leur fournir 20ans de pratiques d’utilisation de pesticides en leur fournissant une photocopie de ce cahier. Elles sont parties ravies de chez moi, car ce que j’ai pu leur fournir est apparemment peu courant. Dans le même temps, on savait déjà que l’EFSA (commission issue de l’Union Européenne) avait donné un avis favorable pour la commercialisation du glyphosate pour une nouvelle période de 15ans alors que depuis quelque années des chercheurs le considère comme potentiellement cancérigène...

20 mars  : Avec surprise, j’apprends qu’un article ’’Monsanto papers’’ du monde économique, fait part dans un article d’une plainte de travailleurs agricoles américains atteints d’un lymphome (comme moi) alors qu’ils travaillaient pour monsanto. Dans ce cadre, la justice américaine a rendu public avoir trouvé des documents confidentiels de monsanto prouvant que cette société sait depuis 1999 que le glyphosate est cancérigène !!! Personnellement, je me dis la que l’on est en passe d’un début de scandale sanitaire de type amiante !!!! Pour comprendre pourquoi cette commission européenne est favorable au renouvellement du glyphosate, il faut avoir en tête que BAYER est une multinationale d’origine allemande et que cette société est en négociation pour racheter monsanto. Fermez le ban !

19 avril : nouvelle consultation. La cancérologue après avoir ausculté la tumeur me dit qu’elle considére que celle-ci a disparu. Néanmoins le traitement doit aller à son terme. La date de la 4e séance de chimio est alors fixée 26 avril

26 avril : 4e séance de chimio, même traitement, mêmes effets ou presque. En effet, le système digestif semble de plus en plus mal supporter le traitement. J’ai des sortes de ballonnements récurrents, un mauvais goût dans la bouche surtout dans la deuxième partie de l’après-midi quand l’estomac est vide. Depuis la 3e séance je ne peut plus boire d’eau plate et ne peut plus manger ou très peu de plat à base de vinaigrette, le tout à cause du mauvais goût que cela a. Je ne suis plus sur des odeurs que je sens, ne suis plus sur du goût des plats quels qu’ils soient. Pour pouvoir boire de l’eau plate, je me suis résolu à ajouter du sirop de menthe.

Anecdote croustillante de ma période conventionnelle : vers juin 2008, j’ai reçu la visite inopinée d’employés du service de la DDRAF de Dijon pour un contrôle sur l’utilisation des pesticides. Le duo était composé d’une jeune femme qui semblait en début de carrière et d’un homme qui lui semblait être plutôt en fin de carrière. C’est la jeune femme qui a pris l’initiative en m’annonçant que ce contrôle se faisait dans le cadre de la PAC. Elle m’a demandé de lui fournir mon cahier d’enregistrement des épandages de pesticides. Déja, j’ai voulu mettre les choses au point en annonçant, que j’étais en fin de conversion Bio, et qu’en conséquence de quoi je ne faisais plus de traitement. Elle me dit : ah bon, mais il y a pourtant des traitements autorisés en bio ! Je lui ai répondu : oui il y en a. mais vu leur efficacité, ce genre de produits est surtout utilisé en production spécialisée (viticulture, maraîchage, arboriculture) qu’en grandes cultures ! Et puis de toute façon, je n’ai plus de pulvérisateur. Elle me dit : vous n’avez plus de pulvérisateur !!! Je lui ai répondu : et bien non ! de toute façon il était en fin de course et je ne l’utilisais plus. Je l’ai donc vendu !
La je l’ai vue s’asseoir, comme sous le choc de ce que je venait de dire ! Le comparse ne disait toujours rien. J’ai eu l’impression qu’il se délectait de ce qui venait de se passer. Je leur ai fourni mon cahier d’enregistrement. Et j’ai ajouté que je n’avais pas de local phyto et que je n’en aurais jamais ; et que je n’avais pas non plus d’aire de rinçage de pulvé et que je n’en avais plus besoin de toute façon. Il me restait quelque produits en stocks, mais que cela allait être éliminer vers la filiére de récupération de pesticides non utilisés et/ou plus autorisés. Mon cahier d’enregistrement a été examiné, avec quelques bénins commentaires. Mon reste de pesticides a été examiné également, sans grosses remarques. Puis ils sont repartis comme ils étaient venus....

 Épisode 6 : le plus dur commence

17 avril  : 5e séance de chimio. Les 2 jours suivants nécessitent de rester tranquille. De toute façon, on a pas le choix, vu que l’on est sans énergie. Même effet sur le goût des aliments et sur la sensation que le corps semble avoir de plus en plus de mal à supporter le traitement, sinon rien de spécial. Après les 2 jours il faut bien reprendre le travail. La vie doit continuer et l’exploitation ne doit pas péricliter.
7 juin : dernière séance de chimio ! Enfin !!! je confirme le corps ne supporte plus le traitement ! 4 jours seront nécessaires pour retrouver l’énergie minimum pour redevenir un minimum actif. Pour la première fois, j’ai eu durant ces 4 jours post-chimio des nausées qui ont entraîné un vomissement. De nouveau, je dois reprendre la travail après ces 4 jours. On est en juin et la moisson doit être préparée... j’ai quand même demandé et obtenu un coup de main pour le travail. Un collègue a accepté de me faire de l’écimage sur certaines parcelles. L’écimage consiste à passer dans les cultures avec une écimeuse. Une écimeuse est une sorte de rogneuse horizontale qui permet d’étêter les herbes indésirables au-dessus des cultures pour les empêcher de produire des graines viables (folles avoines pour ma part). Durant 4 jours, j’ai reçu la visite d’un collègue. Ce collègue m’épand du compost (bio) régulièrement. Il a été surpris de me voir en si petite forme et surpris aussi de me voir chauve. Je lui explique ce qu’il m’arrive, ce qui le laisse déconfit... Ceci qui permet de me rendre compte que ce qu’il m’arrive est dérangeant. En effet, être en ’’bio’’ depuis plus de 10 ans et être atteint de cette maladie est déconcertant. J’ai même vu un collègue en conventionnel faire demi-tour en me voyant chez un fournisseur de pièces...
Moisson 2017 : Tout commence correctement. La batterie de moissonneuse lâche au moment de vouloir partir en moisson, mais ça ce n’est pas très grave. Plus embêtant, lors de la récolte des lentilles, un caillou fait se consumer la poussière dans la moissonneuse-batteuse et le batteur en particulier. Avec 2 extincteurs et de l’eau que j’ai fait ramener dans des bidons de la ferme, je réussit à ce que la machine se flambe pas. Il faudra néanmoins faire venir un réparateur pour changer la câble de commande d’avancement devenu dur à manœuvrer à cause de la chaleur. Il faudra aussi refaire une petite partie du réseau électrique au niveau du batteur. Celui-ci a cramé avec la chaleur. . La moisson reprendra 48 heures après, une fois les réparations faites. Ce qui peut sembler anodin devient compliqué à gérer quand l’on sort d’une telle période.

Les mois qui suivent se ressemblent, à savoir une fatigue journalière. Quand je dis fatigue c’est au-delà de ce que l’on peut imaginer. Suivant les jours et les périodes de travail, certains soirs ce n’est plus de la fatigue, c’est de l’épuisement. On se couche épuisé et on se lève fatigué. En effet, une bonne nuit de sommeil ne suffit pas toujours. Je peux vous dire que les journées sont longues dans ce cas. À un collègue ’’bio’’ qui me demandait des nouvelles, je lui ai donné cette image : c’est comme si l’on avait en permanence un sac à dos de 5 ou 10 kilos sur le dos. Je rappelle aussi que je continue à travailler. Et oui, je dois gagner ma vie … on se rend compte à ce moment là, de l’avantage d’être salarié... pour faire simple, on se contente de gérer les affaires courantes en priorité dont le travail sur l’exploitation, et la vie de famille. Les cheveux ont repoussé au fur et à mesure des semaines, mais cela ne fait pas partie des inconvénients, juste une anecdote ; pour moi en tout cas. Depuis plusieurs années, je suis équipé d’un guidage GPS, et ai pris une participation à une balise permettant une précision de guidage de 1 à 2 centimètres. Cet équipement je le déplace sur les tracteurs et maintenant la moissonneuse-batteuse. J’avais investi dans cet équipement lors une proposition d’achat en groupe. J’avais de plus en plus de mal lors de travaux du sol post-moisson à supporter un mal de coude, des sortes de crampes au bras gauche en particulier à force de tenir le volant. J’ai beaucoup apprécié cet achat qui m’a permis d’économiser mes forces en ces mois particuliers.
Depuis le 17 mars 2017, j’ai obtenu la reconnaissance de maladie professionnelle. J’en ai été ravi. Mais c’est tout, cela ne m’a rien donné que ce soit financièrement ou autre chose... Cela n’engage à pas grande chose, pour ne pas dire à rien d’accorder cette reconnaissance, à l’heure actuelle du moins...

à suivre...

Par Houchot Francis

Le lundi 4 novembre 2019

Mis à jour le 4 novembre 2019