Aide humanitaire : éléments de débat
Yonne Lautre
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L’humanitaire malmené en Syrie16 mai 2018, par Yonne Lautre
Les institutions financières françaises entravent l’action humanitaire en Syrie au nom de la lutte contre le terrorisme. Les associations appellent les autorités françaises et européennes à la raison.
https://lecourrier.ch/2018/05/14/lhumanitaire-malmene-en-syrie/ -
Aide humanitaire : Soirée débat : Adieu à l’Humanitaire - 29/01/2016 - Paris 1022 décembre 2015, par Yonne Lautre
Soirée débat du Collectif des associations citoyennes
La financiarisation des associations sur le secteur social
Autour du livre de Boris Martin « Adieu à l’humanitaire » et des Social Impact Bonds (SIB)
Vendredi 29 janvier 2016 de 18h à 20h30Au Centre social le Pari’s des faubourgs - 12 Rue Léon Schwartzenberg, 75010 Paris
(Métro : Gare de l’Est)
VERSION PDF DE CETTE INVITATION
Cette soirée sera animée par Boris Martin (rédacteur en chef de la revue Humanitaire) et Jean-Claude Boual (président du Collectif des associations citoyennes)
Autour du livre « adieu à l’humanitaire » de Boris Martin : Aujourd’hui le modèle social, économique et politique de la solidarité internationale développé depuis 50 ans par les ONG françaises est en danger. Ce modèle participant d’une société civile parlante, agissante et indépendante est de plus en plus courtisé par les entreprises.
Autour des Social Impact bonds : Innovation financière ou projet de société marchande totale ?
Nous avons été alertés par l’arrivée en France d’un projet de financement des besoins sociaux par des financeurs privés, sous le nom d’« Investissements à Impact Social » (IIS) avec comme cœur du projet les « Social Impact Bonds » (SIB) [VOIR ICI notre dossier complet]. Depuis lors, une multitude de messages, notes et colloques fleurissent, tant au plan national, européen, qu’international, préparant insensiblement la société toute entière à adopter sans méfiance les « SIB ». Hors ce projet constitue une solution ruineuse pour les finances publiques (comme l’ont été les partenariats public-privé) et asservissante pour les projets associatifs, vise à l’appropriation du domaine sociale par le secteur financier et les grands groupes multinationaux. Il est en effet nécessaire d’alerter largement les citoyens et les associations sur le contenu de ces mesures !
Ces deux exemples illustrent les stratégies des oligarchies financières pour « marchandiser » toutes les activités humaines, y compris la protection sociale avec la complicité des oligarchies institutionnelles.
Pour participer
Cette soirée est libre d’accès sur simple inscription sur le FORMULAIRE de lien avant mercredi 27 jan 14h. Pour tout renseignement complémentaire, contac associations-citoyennes.net
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Les femmes, oubliées des crises humanitaires3 décembre 2015, par Yonne Lautre
Les images sont dans tous les esprits. Celles des cohortes de réfugiés jetés sur les routes de l’exode par la guerre civile en Syrie. Celles des plus de 160 000 personnes touchées, en mars 2015, par le cyclone tropical Pam, dans l’archipel du Vanuatu, dans le Pacifique sud. Ou celles des victimes de la série de séismes qui, en avril, ont fait plus de 8 000 morts et autant de blessés au Népal. Dans ces épreuves, tous ne sont pas égaux. En particulier, les femmes sont souvent les « oubliées » de la réponse humanitaire apportée à ces crises. C’est sur cette carence que se focalise le rapport sur l’état de la population mondiale 2015, publié, jeudi 3 décembre, par le Fonds des Nations unies pour la population (UNFPA).
En savoir plus sur http://www.lemonde.fr/planete/article/2015/12/03/les-femmes-oubliees-des-crises-humanitaires_4822628_3244.html -
Au Népal, après le séisme, la diplomatie du désastre humanitaire15 mai 2015, par Yonne Lautre
Lettre de Delhi. La diplomatie du désastre humanitaire a de beaux jours devant elle. Avec les typhons et les sécheresses provoqués par le réchauffement climatique qui s’annonce, de nombreuses catastrophes pourraient à l’avenir déstabiliser des régions et mettre en péril leur sécurité, déclenchant par exemple des migrations massives. Elles donnent aussi l’occasion aux Etats d’afficher leur puissance, leur héroïsme et leur générosité, pour mieux rayonner. En matière de « soft power », la réalité est peut-être plus forte que la fiction, que celle-ci vienne d’Hollywood ou de Bollywood, comme l’a montré la réponse internationale au séisme survenu au Népal, le 25 avril, qui a fait plus de 8 000 morts.
En savoir plus sur http://www.lemonde.fr/planete/article/2015/05/15/au-nepal-apres-le-seisme-la-diplomatie-du-desastre-humanitaire_4634431_3244.html -
L’organisation des secours sur l’Everest suscite la polémique28 avril 2015, par Yonne Lautre
Alors que des milliers de Népalais espèrent d’hypothétiques secours dans les villages d’altitude sinistrés par les avalanches et coulées de boue consécutives au séisme qui a frappé leur pays, samedi 25 avril, la polémique monte sur les secours dans l’Himalaya qui se focalisent sur le sort des candidats à l’ascension de l’Everest (8 848 m). Mardi, 170 alpinistes avaient pu être ramenés au camp de base Sud (5 400 m) grâce aux navettes des hélicoptères.
En savoir plus sur http://www.lemonde.fr/planete/article/2015/04/28/l-organisation-des-secours-sur-l-everest-suscite-la-polemique_4624034_3244.html -
Les ONG en question17 juillet 2014, par Yonne Lautre
Le rôle des ONG fait souvent débat : que ce soit au niveau de leurs interventions sur le terrain et leurs résultats, de leurs financements ou de leurs réseaux discutables (accointances avec les multinationales), la question de leur légitimité est régulièrement posée. Retour sur quelques analyses et prises de position, qui pointent notamment du doigt les liens étroits entre certaines grosses ONG et les puissances financières (multinationales en particulier)...
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L’Afrique se mobilise pour secourir les Norvégiens qui meurent de froid3 décembre 2012, par Yonne Lautre
C’est le monde à l’envers. Depuis vendredi 16 novembre dernier, Radi-Aid, Africa for Norway est LA parodie vidéo à ne pas louper sur le Net. On y voit des Africains se mobiliser pour envoyer de vieux radiateurs en Norvège, où les enfants meurent de froid dans des conditions climatiques atroces liées aux hivers rigoureux.
Lancée par des étudiants norvégiens et le Fonds académique d’aide internationale (SAIH), cette campagne de sensibilisation prend à rebrousse poil les collectes de fonds qui reposent sur les clichés misérabilistes et stigmatisants.
Le froid glacial tue aussi
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Le n°5 de Là-bas est paru. Grand angle : Le tourisme solidaire20 août 2012, par Yonne Lautre
L’éco-tourisme, le volon-tourisme, le tourisme solidaire… Autant de termes pour qualifier un concept en vogue : celui de combiner vacances et aide humanitaire, et donc de voyager utile. Le risque ? Que les pays en développement deviennent d’immenses parcs d’attraction où illusions et bons sentiments riment avec profits.
Avec en éclairage notre reportage au Cambodge sur les orphelinats factices. Pierre Yves, français venu à Pnomh-Penh pour tenter d’être utile, s’engage comme volontaire pour la NCCO, une ONG locale de recueil des orphelins. Il donne des cours aux enfants, aide au fonctionnement de l’association, récolte des dons… Puis commence à creuser les choses, et s’aperçoit que tout cela n’est fait que pour enrichir le propriétaire de l’a
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Les droits de l’homme selon le libéralisme par Ahmed Halfaoui24 mars 2012, par Yonne Lautre
Les droits de l’homme selon le libéralisme
Pour appeler l’OTAN à bombarder la Libye, il y avait 70 ONG. Pour appeler au secours des populations menacées par la famine au Tchad, elles ne sont que deux. Les premières sont occupées sur un autre chantier, en Syrie, où leur nombre a presque triplé. Elles sont 200 à faire la commande de bombardiers. Les droits de l’homme au Tchad n’intéressent, apparemment, pas. Tout autant qu’en Somalie.
Pourtant les 70 associations, qui ont réussi le pari de faire de la Libye un champ de ruines et d’incertitudes, sont directement responsables de ce qui se passe. Les deux ONG qui ont lancé l’alerte, Action contre la Faim et Première urgence-aide médicale, annonce une grave crise alimentaire qui se prépare au Sahel, et qui touche déjà le Tchad.
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Aide humanitaire : éléments de débat Quand l’aide humanitaire sert les aspirations politiques17 février 2011, par Yonne Lautre
Dans son rapport publié le 10 février dernier, et intitulé « À qui doit profiter l’aide ? », l’ONG internationale Oxfam dénonce l’actuelle tendance à la politisation et la militarisation de l’aide humanitaire. Selon elle, depuis 2001, « on note une tendance croissante à utiliser l’aide pour gagner ’les cœurs et les esprits’ dans les conflits ». Des milliards de dollars d’aide internationale ont ainsi été employés pour des projets non durables, coûteux, voire dangereux. Cet argent est mis à profit par les bailleurs de fonds internationaux pour appuyer leurs propres politiques étrangères et leurs objectifs de sécurité à court terme. En clair, les pays donateurs consacrent proportionnellement plus d’aide aux pays qui peuvent servir leurs intérêts politiques et militaires.
http://www.univers-nature.com/inf/inf_actualite1.cgi?id=4574
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Aide humanitaire : éléments de débat Relations entre M. Kouchner et Médecins Sans Frontières : une clarification s’impose24 mai 2007, par A
Espace PresseCommuniqué
Info-presse
Relations entre M. Kouchner et Médecins Sans Frontières : une clarification s’impose
Paris, le 22 mai 2007.
Médecins Sans Frontières constate, quelques jours après la nomination de Monsieur Kouchner à la tête du ministère des Affaires étrangères français, qu’une forte confusion persiste entre ses actuelles responsabilités et le rôle qu’il a joué dans des organisations humanitaires, dont MSF. Cette confusion qui mélange action politique et action humanitaire, est profondément dommageable à notre action et au déploiement de secours impartiaux et indépendants sur les terrains de crise. Dans les conflits, elle peut même s’avérer dangereuse.
C’est pourquoi il nous paraît indispensable de clarifier les relations entre M. Kouchner et Médecins Sans Frontières et réaffirmer notre indépendance, vis-à-vis des autorités françaises, comme de tout pouvoir. Cela passe par un rappel des faits :
- M. Kouchner a fait partie du groupe de douze médecins et journalistes qui ont créé MSF en 1971 ;
- M. Kouchner a quitté MSF en 1979 sur un désaccord de fond portant sur le développement et la professionnalisation de l’association ;
- Depuis cette date, M. Kouchner n’exerce plus aucune fonction ni responsabilité au sein de Médecins Sans Frontières ;
- Depuis près de 30 ans, Médecins Sans Frontières et M. Kouchner se sont opposés sur leur vision de l’action humanitaire : M. Kouchner est favorable à un humanitaire d’Etat qui trouve notamment sa traduction dans le << droit d’ingérence humanitaire >> ; au contraire, Médecins Sans Frontières défend et met en oeuvre une action humanitaire impartiale et indépendante de tout pouvoir politique, économique et religieux.
- Médecins Sans Frontières n’est pas une organisation française mais internationale, comptant 18 sections en plus de la section française. Les activités de la section française de Médecins Sans Frontières sont financées à 99% par des ressources d’origine privée. MSF ne reçoit aucun fonds du gouvernement français.
Perçue à tort comme partie prenante de la politique étrangère française, l’action de Médecins Sans Frontières pourrait être gravement compromise, notamment dans les conflits où la France est engagée militairement, comme en République Centrafricaine et au Tchad. Il est aujourd’hui de la responsabilité de chacun, notamment de Monsieur Kouchner, de ne pas assimiler Médecins Sans Frontières à la défense d’intérêts nationaux. L’action des volontaires de Médecins Sans Frontières n’a qu’une seule fin : secourir des populations en danger, sans aucune discrimination.
Pour plus d’informations, consultez notre site internet (http://www.msf.fr), notamment l’interview de Jean-Hervé Bradol, Président de MSF : « Humanitaire et Politique : attention à la confusion ».
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Aide humanitaire : éléments de débat Humanitaire N°15 - Humanitaires contre Alters ?3 janvier 2007, par A
Dossier
Humanitaires contre Alters ?
• Table ronde animée par Denis Maillard
Avec : Henri Rouillé d’Orfeuil, Gustave Massiah, Chico Whitaker, Michel Brugière, Estelle Kramer
• Humanitaires et altermondialistes, par Gustave Massiah
• La galaxie altermondialiste : un espace coopératif fait de rivalités, par Isabelle Sommier
• « On parle de choses différentes », entretien avec Pierre Salignon, directeur général de Médecins sans Frontières-France
• Humanitaires contre Alters : un vrai faux débat ?, par Julie Ancian
• Faut-il choisir entre humanitaires et altermondialistes ?, par Chico Whitaker
Actualités
• La vérité tue, Anna Politkovskaya réduite au silence pour avoir parlé, par Bleuenn Isambard
• Humanitaire et militaire, par Patrick Aeberhard, Général (2S) Thomann et Robert Chaouad
• Reconstruction post-conflit des systèmes de santé : le cas de la RDC, par Didier Cannet
• Darfour : l’action humanitaire en sursis ? Nos représentations de la crise en question, par Pierre Salignon
• Révoltés et déterminés !, par Benoît Miribel -
Aide humanitaire : éléments de débat Violence et VIH/sida : il est nécessaire d¹adopter des approches fondées sur les droits humains2 décembre 2006, par A
AMNESTY INTERNATIONAL
Déclaration publique
POL 30/056/2006 (Public)29 novembre 2006
Violence et VIH/sida : il est nécessaire d¹adopter des approches fondées sur
les droits humainsÀ l¹occasion de la Journée mondiale de lutte contre le sida 2006, le 1er
décembre, Amnesty International demande que les droits humains de toutes les
personnes vivant avec le VIH/sida soient protégés et que toutes les
politiques mises en ¦uvre privilégient une approche fondée sur les droits
humains.Il est essentiel de garantir le respect, la protection et la réalisation de
ces droits pour que tous notamment les femmes, les enfants et les pauvres
bénéficient d¹un meilleur accès au traitement, aux soins, à l¹appui et aux
programmes de prévention, dans le cadre de l¹accès universel d¹ici 2010. Les
gouvernements doivent absolument atteindre les objectifs et les engagements
souscrits dans les Objectifs du millénaire pour le développement et la
Déclaration d¹engagement de la Session extraordinaire de l¹Assemblée
générale des Nations unies sur le VIH/sida en 2001.Les personnes infectées par le VIH/sida continuent d¹être en butte aux
réactions de rejet et aux violations de leurs droits, notamment aux
violences fondées sur des préjugés liés à leur statut. Et la violence, en
particulier sexuelle et sexiste, accroît les risques d¹infection du VIH.
Pour être efficace, la riposte au VIH/sida doit tenir compte des facettes
sociales, économiques et culturelles du problème, notamment en favorisant
l¹accès des femmes aux ressources économiques et le respect de leur
autonomie et de leur intégrité physique.Il importe de connaître le statut sérologique à l¹égard du VIH d¹une
personne pour lui permettre de bénéficier d¹un traitement et protéger son
droit à la santé. Indispensables, les tests de dépistage du VIH doivent être
généralisés en vue de réaliser l¹accès universel à la prévention, au
traitement, aux soins et à l¹appui pour tous. Accélérer le dépistage suppose
de protéger les droits de chacun à la confidentialité, au conseil et au
consentement éclairé.Aussi est-il primordial d¹apporter un conseil sur les implications du test,
d¹offrir un soutien en cas de résultats positifs et de garantir la
confidentialité des résultats. Les tests de dépistage du VIH dans le cadre
d¹examens prénataux doivent se faire dans le respect des droits des femmes
et tenir compte des inégalités politiques, sociales et économiques
susceptibles d¹accroître leur vulnérabilité face aux répercussions
négatives. Cela suppose un conseil et un soutien appropriés, dans un
contexte marqué par la violence sexuelle et domestique.En facilitant l¹accès aux tests de dépistage du VIH, les donateurs, les
gouvernements et les organismes qui développent et mettent en ¦uvre ces
initiatives doivent veiller au respect des principes régissant le test
volontaire consentement éclairé, confidentialité du statut sérologique à
l¹égard du VIH et conseils pertinents en fonction du genre et de la
sexualité.Les programmes d¹aide bilatérale et les organismes multilatéraux, dont
l¹Organisation mondiale de la santé (OMS), le Programme commun des Nations
unies sur le VIH/sida (ONUSIDA), les gouvernements et les donateurs, dans le
cadre du financement, du développement et de la mise en ¦uvre des programmes
et politiques relatifs au VIH/sida, doivent faire en sorte que :
toutes les politiques et initiatives en matière de dépistage du VIH soient
mises en ¦uvre dans le droit fil des instruments relatifs aux droits humains
auxquels les gouvernements ont souscrit ;
les systèmes et équipements de santé soient renforcés afin de protéger les
droits humains des patients et s¹accompagnent de programmes visant à lever
les obstacles au dépistage, notamment en favorisant l¹accès aux services en
fonction du genre, du statut économique et de la situation géographique ;
toutes les personnes séropositives au VIH reçoivent le traitement, les
soins et l¹appui requis. Toute initiative doit donc se pencher sur les
causes et conséquences du rejet et de la discrimination, et appuyer la lutte
contre la violence sexuelle en premier lieu sur le dépistage et le conseil ;
les initiatives de dépistage soient adaptées et tiennent compte du
contexte local particularités culturelles, épidémiologiques et système de
santé tout en garantissant les droits humains des personnes testées.— Service Presse Amnesty International Belgique francophone
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Aide humanitaire : éléments de débat La solidarité à la sauce Bill Gates Par Damien MILLET17 août 2006, par A
Une poignée d’individus confisque progressivement l’aide au Sud, délaissée par les Etats.
La solidarité à la sauce Bill Gates
Par Damien MILLET
QUOTIDIEN : Jeudi 17 août 2006 - 06:00
Damien Millet président du CADTM France (Comité pour l’annulation de la dette du tiers-monde). Coauteur de la bande dessinée Dette odieuse, CADTM/Syllepse, 2006. -
Aide humanitaire : éléments de débat Pour une nouvelle approche de la malnutrition Par Jean-Hervé Bradol12 juillet 2006, par Transmis par rezo.net
MALNUTRITION
Pour une nouvelle approche de la malnutrition
Mis en ligne le 7 juillet 2006
Considéré comme la seule solution face à la persistance des disettes et des famines en Afrique sub-saharienne, le développement économique n’a pas permis de faire baisser la malnutrition. Pourtant, des progrès scientifiques et techniques permettent une nouvelle approche médicale curative et préventive de la malnutrition aiguë. Expérimentée avec succès par MSF au Niger, cette avancée ouvre des perspectives prometteuses et démontre qu’il est possible d’éviter la mort de milliers d’enfants.
Par Jean-Hervé Bradol, président de Médecins Sans Frontières.
Au Niger, l’année 2005 a permis d’éclairer plusieurs facteurs déterminants des crises nutritionnelles récurrentes ainsi que de tester en situation une approche nouvelle permettant d’en réduire la mortalité dans de larges proportions.
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Aide humanitaire : éléments de débat Liberia Fillettes en libre-service10 mai 2006, par A
L’organisation britannique vouée à la protection des enfants, Save the Children livrait lundi une enquête accablante sur l’exploitation sexuelle des enfants de 8 à 18 ans dans les sites dévolus au Liberia à l’action humanitaire internationale. Sur ce théâtre de la misère où même l’aide alimentaire a un prix, les très jeunes filles sont la cible principale des amateurs de sexe à bon marché.
Forts de leur statut, casques bleus, policiers ou soldats du cru, travailleurs humanitaires, enseignants, boutiquiers et autres notables réels ou imaginaires font leur marché de chair fraîche dans les camps de déplacés et jusque dans les villages où ont commencé les rapatriements. Le phénomène est massif et en voie d’expansion. Pis encore, il se banalise.
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> Aide humanitaire : éléments de débat Impérialisme humanitaire. Jean Bricmont19 décembre 2005
Impérialisme humanitaire.
Jean Bricmont
Entretien de Silvia Cattori avec Jean Bricmont, 27 novembre 2005.
Jean Bricmont, est professeur de physique théorique à l’Université de
Louvain ;
intellectuel engagé, il vient de publier : « Impérialisme humanitaire. Droits
de
l’homme, droit d’ingérence, droit du plus fort ? ». Un ouvrage qui analyse
la
manière dont l’idée de défense des droits de l’homme dans
l’interventionnisme
occidental s’est peu à peu transformé en légitimation de l’ingérence
militaire.
Jean Bricmont fait également partie du « Brussels Tribunal ». Un tribunal
d’opinion qui examine les crimes de guerre en Irak et se veut la
continuation
de la grande mobilisation internationale contre la guerre en Irak. Composé
d’intellectuels et de juristes, le Brussels Tribunal s’inscrit également
dans
un mouvement plus large qui veut mettre un terme au nouvel ordre
impérialiste
mondial.Silvia Cattori : En ouverture de votre dernier livre "Impérialisme
humanitaire",
vous écrivez qu’il existe deux sortes de sentiments qui poussent à l’action
politique : l’espoir et l’indignation". Toute personne dotée d’une conscience
ne
peut que se sentir indignée après vous avoir lu. Des pays entiers ont été
sauvagement détruits par des gouvernements qui, comme les Etats-Unis, ont
agi
en dehors des lois et, plus grave, avec la complicité de ce qu’il est
convenu
d’appeler la « communauté internationale ». Quels moyens peut-on mettre en
ouvre
pour répandre cette indignation dans l’opinion publique et lui assurer un
impact politique ?Jean Bricmont : Question compliquée ! Je me limite à ce que je suis capable
de
faire, écrire et parler ; évidemment, il faut d’autres relais, des
organisations politiques que je ne suis pas capable personnellement de
mettre
sur pied. Celles qui existent ne sont pas suffisamment conscientes des
véritables priorités, à mon humble avis. Il faut recréer un mouvement
international contre la guerre en Irak, comme il y en a eu à l’époque de la
guerre d’Algérie, de la guerre du Viêt-Nam, de la crise des missiles, et
comme
il n’en existe plus aujourd’hui.S.C. - Pensez-vous que le défi lancé au monde par « Axis for Peace », crée à
l’initiative de Thierry Meyssan du Réseau Voltaire, puisse être le point de
départ d’un grand mouvement anti-guerre ?Jean Bricmont : L’idée est une bonne idée, rassembler des gens d’horizons
philosophiques, politiques, religieux divers, et qui agissent en faveur de
la
paix ; la plupart des conflits dans le monde sont des conflits régionaux,
entre
pays voisins ou à l’intérieur d’un même pays. Il n’y a qu’un seul pays qui
se
permet d’envoyer ses troupes loin de ses frontières, contre un pays qui ne
lui
a rien fait de mal, sous des prétextes entièrement fabriqués, et ce sont les
Etats-Unis. Cette façon d’agir est une menace pour la paix mondiale, et elle
doit être arrêtée ; ce n’est pas une tâche simple, il faut une collaboration
de
la population américaine, et je constate qu’une partie de celle-ci se rend
compte que l’opinion publique mondiale n’accepte pas la politique de leur
gouvernement. En protestant ici contre la politique américaine, nous
soutenons
les gens qui, aux Etats-Unis, veulent changer la politique de leur pays.S.C. - Si les gens sont en leur majorité horrifiés par les images qui
viennent
d’Irak, d’Afghanistan, de Palestine, ils ne savent pas clairement que toute
cette barbarie a eu le soutien des partis progressistes. Comment ces
derniers
ont-ils pu dériver au point d’aller jusqu’à faire croire que Bush et Blair
faisaient une guerre pour de bonnes raisons alors qu’il s’agissait
d’agressions
contre la liberté et la dignité de peuples ?Jean Bricmont : Il faut nuancer ; il y a ici plusieurs aspects. La politique
de
Bush lui-même n’a pas été très populaire dans les milieux qu’on peut appeler
de
gauche, y compris dans la mouvance favorable à l’ingérence humanitaire. La
politique qui a été vraiment populaire, c’était celle de Clinton ; durant
toute
la période où il a été président, il y a eu un embargo contre l’Irak qui a
fait
sans doute plus de morts que la guerre, et j’ai vu très peu de protestations
contre cet embargo de la part des gens qui chantaient les louanges de
l’ingérence humanitaire, par exemple en Yougoslavie. Si les gens ne
soutiennent
pas la politique de Bush, c’est parce qu’il a l’art de la présenter très
mal, ce
qui a pour effet de la rendre impopulaire ; il est aussi très arrogant, ce
qui
aggrave son impopularité, surtout à l’étranger. Clinton n’était pas comme
cela.
Par ailleurs, le soutien de la gauche à l’interventionnisme a freiné
l’opposition aux guerres, même à celles de Bush, et rend cette opposition
relativement superficielle. On ne s’oppose pas à l’hégémonie et à la guerre
en
Irak par principe, mais parce que Bush est maladroit. Le but du livre est de
secouer cette partie de la gauche constituée de gens souvent très sincères,
mais qui n’ont pas une vision suffisamment globale de la situation pour
avoir
comme priorités la paix et le respect de la souveraineté nationale des pays
du
Tiers Monde. Ce genre d’idées a été laminé par l’idéologie de l’ingérence
humanitaire qui est née après la guerre du Viêt-Nam.S.C. - Quels sont les pays qui ont subi des guerres au nom de ce « droit
d’intervention » ?Jean Bricmont : Depuis le début de l’ère coloniale, il y a fondamentalement
en
Occident une idéologie selon laquelle, parce que nous sommes des pays
civilisés, plus respectueux de la démocratie et des droits de l’homme, plus
développés, plus rationnels, plus scientifiques etc., nous avons le droit de
faire des choses monstrueuses à des pays que nous considérons comme moins
civilisés. Le christianisme, la mission civilisatrice de la république, le
fardeau de l’homme blanc chez les Anglais, ont successivement servi de
justification idéologique à des crimes abominables. Maintenant, l’idéologie
qui
tend à remplacer tout cela, c’est l’idéologie des droits de l’homme et de la
démocratie. Cela ne va pas forcément jusqu’à la guerre, mais cela englobe
d’autres formes d’action, comme l’embargo contre l’Irak ou contre Cuba, et
d’autres sanctions, qui sont acceptées parce que dirigées contre des régimes
horribles ou supposés tels. La gauche devrait prendre en considération ce
que
disent les sommets des pays du Sud, ou des pays non alignés, qui sont
opposés
à toutes ces sanctions et qui le disent très explicitement. Pour eux, aucune
sanction ne peut être unilatérale et tout doit passer par l’ONU. Les pays du
Sud, qui représentent l’immense majorité du genre humain, ne veulent en
aucun
cas de cette politique d’ingérence.S.C. - Vous avez écrit : "L’idéologie de notre temps, en tous cas en ce qui
concerne la légitimation de la guerre, n’est plus le christianisme, ni la
« mission civilisatrice » de la République, mais bien un certain discours sur
les
droits de l’homme et la démocratie. C’est à ce discours et à cette
représentation qu’il faut s’attaquer si l’on veut construire une opposition
radicale et sans complexe aux guerres actuelles et futures." Mais d’où est
sortie cette théorie du droit d’ingérence humanitaire ?Jean Bricmont : L’origine remonte essentiellement à l’administration Carter,
qui
a pris un tournant. Avant et pendant la guerre du Viêt-Nam il y avait une
politique de soutien aux régimes anticommunistes, respectueux ou pas des
droits
de l’homme, au nom de la lutte contre le communisme. Après la fin de la
guerre
du Viêt-Nam, Carter a redoré le blason des Etats Unis en disant que les
droits
de l’homme étaient l’âme de leur politique étrangère. Cela entrait en
contradiction avec leur pratique politique au Timor ou en Afghanistan, mais,
avec cette idéologie et à cause de l’impact des « nouveaux philosophes » en
France, il y a eu une pression énorme dans la gauche pour se distancer des
mouvements révolutionnaires et de libération dans le Tiers-Monde. La crise
yougoslave a été le sommet de la légitimation de l’intervention parce que la
gauche s’est mise à répéter des slogans comme : « on ne peut pas laisser
faire
ça », « c’est comme Hitler avant la guerre » etc. Le changement de mentalité
était accompli avec la guerre du Kosovo, et la gauche, en Occident
notamment,
avait complètement capitulé sur la question de la défense de la souveraineté
nationale et du droit international. Ce qui fait que l’opposition à la
guerre
en Irak était très faible, idéologiquement, en particulier à la tête des
organisations qui pouvaient structurer cette opposition. On acceptait des
arguments du style, « oui, mais il faut d’abord désarmer l’Irak. ». Presque
tous les prétextes en faveur de la guerre étaient acceptés, même par ceux
qui
déclaraient être contre la guerre. Et aujourd’hui, les mêmes personnes
semblent
accepter l’idée que les Américains vont rester indéfiniment en Irak. L’idée
générale, c’est qu’on assiste en Irak à une transition vers la démocratie :
tout ne va pas bien mais les choses vont globalement mieux ou, au moins,
vont
finir par s’améliorer. Au moment de la chute de Bagdad la plupart des gens
autour de moi croyaient que c’était fini et qu’il n’y aurait pas de
résistance.
Beaucoup pensent encore que celle-ci finira par être vaincue, mais moi j’en
doute fort.S.C. - Les idéologues qui ont proclamé qu’il fallait imposé la démocratie
pour
combattre le « terrorisme » n’ont-ils pas inversé le problème pour leur
convenance ? N’eut-il pas fallu s’attaquer aux causes profondes, notamment à
Israël, qui engendre tous les conflits régionaux ?Jean Bricmont : Je ne dirais pas que cela engendre tous les autres conflits,
mais ça joue un rôle énorme dans beaucoup d’autres conflits, c’est certain.
Les
Occidentaux ne comprennent pas que la nature du conflit israélo-palestinien
dépasse de loin les frontières d’Israël ou de la Palestine pour une raison
très
simple : ce que les Européens ont fait, c’est de faire payer par les Arabes
les
crimes commis par les Européens contre les juifs. On peut résumer les choses
ainsi : on n’a pas créé un Etat juif en Europe, pour compenser les malheurs
subis par les juifs en Europe, pas simplement parce que les sionistes
voulaient
un état en Palestine, mais parce que celle-ci était peuplée par des Arabes,
considérés à l’époque comme quantité négligeable. Depuis lors, la racine du
conflit n’a jamais été reconnue, d’autres conflits se sont ajoutés au
conflit
initial, des territoires sont occupés, etc. En fait, les choses se sont
aggravées et il y a un aveuglement des Occidentaux sur les racines et la
profondeur du conflit. N’importe quel enfant qui grandit à Rabat, même s’il
est
très loin de la Palestine, sait que si Israël a été créé là où il l’a été,
c’est parce les Européens qui ont fait cela, juifs ou non-juifs, se
croyaient
plus civilisés que des Arabes comme lui, et cela, c’est difficilement
tolérable. C’est une dimension du conflit qui est bien plus profonde que ce
qui
est perçu en général en Occident.S.C. - A propos de la critique de la politique d’Israël et du sionisme, vous
avez écrit : "Lorsque des Juifs comme Norman Finkelstein ou Noam Chomsky
osent
critiquer la politique du mouvement sioniste, on essaie de les faire taire
en
les accusant d’une étrange maladie psychologique, la « haine de soi ». Et pour
ce
qui est des non-juifs, un seul mot suffit : antisémitisme". Que peut-on faire
pour reconquérir un droit de libre expression, actuellement étouffé -
notamment
en France - par ces accusations infondées ?Jean Bricmont : Il y a deux types de problèmes : d’une part la démonisation
et
l’intimidation, d’autre part les procès (Dieudonné Mbala Mbala, Edgar Morin,
Israël Shamir et d’autres). Face à cela, il faut défendre la liberté
d’expression. C’est une autre erreur de la gauche et, de façon ironique,
c’est
précisément une gauche qui se veut antifasciste et antistalinienne, qui
adopte
la doctrine, commune au fascisme et au stalinisme, selon laquelle l’Etat a
le
droit de déterminer ce qu’on peut dire en matière d’histoire ou sur d’autres
sujets. Les lois qui répriment la liberté d’expression partent d’idées
antiracistes peut-être généreuses mais mal comprises. Ces lois, de même que
la
loi Fabius-Gayssot contre le négationnisme, sont en général soutenues par la
gauche et l’extrême-gauche (Gayssot est communiste). Je pense que c’est une
erreur complète, parce que la réponse à des discours dits de haine, c’est
plus
de discours, pas moins. Il y a parfaitement moyen de combattre
l’antisémitisme
tout en respectant la liberté d’expression ; il ne manque pas de médias dans
lesquels exprimer des points de vue critiquant l’antisémitisme. Je suis par
ailleurs tout à fait d’accord pour critiquer l’antisémitisme mais on ne peut
le
faire efficacement qu’en distinguant radicalement l’antisionisme, qui
consiste
en un certain nombre d’attitudes politiques, et l’antisémitisme, qui est une
forme de racisme. Les gens qui amalgament les deux pensent qu’ils vont se
débarrasser de l’antisionisme en le rendant infâme, en l’associant à
l’antisémitisme ; le problème c’est qu’on peut lire l’équation
antisionisme=antisémitisme à l’envers, c’est-à-dire légitimer
l’antisémitisme
en l’associant à l’antisionisme. Ceux qui pratiquent cette assimilation
pensent
qu’elle va faire disparaître des idées qu’ils n’aiment pas, mais ils ne se
rendent pas toujours compte qu’elle peut aussi légitimer des idées qu’ils
aiment encore moins.S.C. - Les mouvements qui se prétendaient anticolonialistes ont appuyé
l’idéologie de l’interventionnisme occidental. Des personnalités
politiques -
comme Bernard Kouchner, Cohn Bendit, Joska Fischer - se sont cyniquement
servies des droits de l’homme et la démocratie pour des raisons
opportunistes.
La responsabilité de ces va-t-en guerre n’est-elle pas d’autant plus grande
que
les médias leur ont accordé toute latitude pour faire du lavage de cerveaux
?Jean Bricmont : Je ne veux pas trop m’attaquer à des personnes ; il est vrai
que
je cite parfois dans le livre des gens qui sont représentatifs de cette
mouvance, comme Kouchner ou Havel. Mais l’important, c’est la dérive du
mouvement écologique. Quand ce mouvement est né, il était non-violent,
contre
toute armée, et maintenant il soutient une politique d’ingérence humanitaire
qui suppose une armée importante. Exiger une politique d’ingérence
humanitaire
cela suppose d’avoir des moyens, une armée puissante, la possibilité de
transporter des troupes à des milliers de kms. Cette transformation du
mouvement écologique est extraordinaire ! À l’époque de la guerre froide, il
y
avait vraiment une menace de guerre, peut-être exagérée, mais l’URSS était
néanmoins puissante et son armée nous était potentiellement hostile.
Pourtant,
à l’époque, les écologistes prônaient une défense civile non violente, même
en
cas d’agression soviétique. Donc l’idéologie de l’ingérence a produit des
transformations profondes, irréconciliables avec la perspective écologiste
de
départ, à cause justement de la militarisation que leur nouvelle posture
politique suppose. Cela s’est fait dans les années 1990, et ces mouvements
opposent maintenant une résistance très faible à la guerre en Irak, ils ne
disent pas grand chose sur ce sujet, et ils ne font pas grand chose. Ils ne
disent pas par exemple : notre priorité c’est d’exiger le retrait des troupes
américaines d’Irak. Aux USA, paradoxalement, il existe une opposition à la
guerre très forte dans certaines parties de la droite, qui n’est pas
néoconservatrice, mais qui est plus traditionnelle, ainsi que chez certains
militaires et leurs familles qui payent le coût de la guerre, en vies
humaines.
Cette opposition contraste avec l’attitude des démocrates, ou de la gauche «
modérée », qui disent : « Il faut continuer à occuper, on ne peut pas
laisser
tomber les Irakiens etc ». Il n’y a pas que le gouvernement Bush qui
affaiblit
le mouvement de la paix !S.C. - Il y a eu unanimité de la part des forces politiques pour balayer les
principes qui régissent le droit international. En ne condamnant pas les
Etats,
qui ont violé ces principes, les instances internationales ont également
perdu
tout crédit. Le Conseil de sécurité de l’ONU a entériné les pires sanctions.
Le
temps n’est-il pas venu de mettre des garde-fous pour empêcher la
superpuissance
des Etats-Unis d’aller plus loin ? Et n’est-il pas déjà trop tard ?Jean Bricmont : Il n’est jamais trop tard. En ce qui concerne l’ONU, il faut
être nuancé. Ce que vous dites du Conseil de Sécurité est vrai, ils ont
légitimé l’agression, les sanctions etc. Mais il faut quand même voir l’ONU
comme une avancée majeure par rapport à ce qui existait avant 1945, parce
qu’elle a renforcé le droit international et a offert un moyen de régler des
conflits de façon pacifique avant qu’ils n’éclatent. Les votes de
l’assemblée
générale de l’ONU sont aussi intéressants : ils expriment sur beaucoup de
questions le point de vue de l’opinion publique mondiale. Le problème du
Conseil de Sécurité, c’est le droit de veto, et le pouvoir exorbitant des
Etats-Unis, qui ont des moyens de pression énormes sur les membres non
permanents du Conseil de Sécurité. Toute réforme de l’ONU doit passer par
l’ONU, c’est-à-dire avoir l’accord des pays qui ont le droit de veto, et je
ne
sais pas comment les forcer à admettre des réformes qui seraient positives
en ce
sens qu’elles limiteraient le pouvoir des états les plus puissants,
c’est-à-dire
le leur.-
> Aide humanitaire : éléments de débat Impérialisme humanitaire. Jean Bricmont (suite et fin)19 décembre 2005
Je pense que des projets régionaux, le projet bolivarien en
Amérique du
Sud ou le groupe de Shanghai qui regroupe la Chine, la Russie et d’autres
pays,
et qui essayent de mettre des garde-fous à l’hégémonie américaine, sont de
bonnes choses. Et certains dirigeants américains se rendent bien compte que
c’est la politique de Bush qui, par réaction, suscite ces dynamiques, et
donc
ils voudraient bien une politique plus douce, ce qui se produira sans doute
quand les démocrates reviendront au pouvoir, un retour à la politique de
Clinton. Si les choses tournent mal en Irak pour eux, et si ça devient
catastrophique, il y aura peut-être un électrochoc, une révolte de la
population. Pour le moment, la population n’est pas très concernée, elle est
relativement indifférente, mais une politique isolationniste pourrait très
bien
avoir le soutien de la majorité de la population américaine. Pour le reste
du
monde, ce serait sans doute la moins mauvaise solution.S.C. - Dès lors que l’agresseur est aussi celui qui finance les ONG, cela
implique que l’on attend d’elles qu’elles se conduisent avec les bourreaux
comme s’ils étaient parfaitement légitimes. Peut-on encore faire confiance à
ces ONG qui ont trempé dans ces désastres programmés et font aujourd’hui de
l’humanitaire comme si c’était du business ?Jean Bricmont : Je ne veux pas me prononcer de façon trop catégorique, je
n’ai
pas étudié la question des ONG en détail. Je donne simplement un certain
nombre
d’exemples dans le livre : lorsqu’il y a eu la guerre en Irak, Human Rights
Watch
a dénoncé la façon dont les USA ont fait la guerre, qui a causé,
disaient-ils,
des centaines de morts inutiles. Or, d’après une étude publiée par la
prestigieuse revue médicale The Lancet, il y aurait eu 100.000 morts civils
et,
au minimum, on en compte 25 000. Donc la déclaration de Human Rights Watch
est
tout-à-fait remarquable : on s’indigne en dénonçant un crime, tout en
minimisant fortement son ampleur, ce qui est une façon particulièrement
hypocrite de le défendre. Le fond du problème, c’est le « N » dans ONG.
Dans
quelle mesure est-il réel ? Les ONG ne sont pas gouvernementales au sens
strict, mais elles sont en général et en grande partie financées par les
gouvernements, ou par l’Union européenne, et ça ne semble pas leur poser
problème ! En fait, comme ces ONG, sont financées par des pays
démocratiques,
leurs militants pensent que ce financement ne peut pas avoir d’influence,
les
biaiser, les amener à faire certaines choses plutôt que d’autres. Or il est
évident, pour prendre un exemple extrême, qu’une ONG de médecins ne serait
pas
financée pour aller soigner les membres de la résistance irakienne. Donc, la
source de financement des ONG, qui elle est gouvernementale, influe sur
leurs
choix. C’est un peu comme la presse : elle est « libre », mais tous les
journalistes intériorisent l’idée qu’il y a des choses qui ne se font ou ne
se
disent pas : celles qui mettraient en cause leurs contacts avec des gens de
pouvoir, ou les ressources publicitaires de leurs journaux. Parmi les
militants
des ONG, la principale naïveté concerne la croyance en la neutralité des
États
qui les financent.S.C. - La situation des victimes est encore rendue plus dramatique par
l’état
d’infériorité dans laquelle ces peuples se trouvent. Il leur est également
interdit de résister à l’agresseur. Donc tout se passe comme si la dignité
des
personnes n’avait pas de valeur quand il s’agit d’Arabes et de musulmans. Or
votre livre, comme un cri, laisse entendre que se taire, ce n’est plus
possible. Que peuvent faire les citoyens désireux de changer les choses sans
se
laisser égarer par les politiques ?Jean Bricmont : J’ai essayé d’argumenter, de faire un livre qui attaque
aussi
rigoureusement que possible l’idéologie impériale. Je ne veux pas prendre
les
gens par les tripes, quoique je parte d’une indignation ; j’ai été choqué de
voir la faiblesse de l’opposition lors de la guerre en Yougoslavie, dans les
mouvements anti guerre, pacifistes, d’extrême gauche, etc. En 2003, la
population s’est mobilisée, c’est vrai, mais c’était momentané. La situation
en
Irak choque probablement beaucoup de gens, mais ils ne comprennent pas que
ce
qu’il faut faire, c’est dire aux Etats-Unis : « respectez le droit
international, point à la ligne, rentrez chez vous ». Si, en Irak, il n’y
avait
pas eu de résistance, tout le monde aurait dit : c’est très bien, Bush les a
débarrassés de Saddam Hussein, et hop, ils auraient fait la guerre à l’Iran,
à
la Syrie, ou à Cuba, jusqu’à ce qu’ils soient arrêtés quelque part. J’ai
toujours pensé, depuis le début de l’idéologie de l’ingérence, que cela
mènerait à un nouveau Dien Bien Phu ou à un nouveau Stalingrad, parce que
cette
idéologie est complètement erronée. Nous devons coopérer avec les pays du
Tiers-Monde sur la base d’un respect mutuel, pas nous ingérer dans leurs
affaires intérieures. Depuis le début des années 1980, la gauche se trompe
complètement de cap avec cette idéologie. En plus, c’est un truc qui flatte
le
pouvoir des pays occidentaux (vous allez sauver les Kosovars, les femmes
afghanes, etc.), et surtout son pire aspect, le pouvoir militaire.S.C. - Vous dites que l’avenir retiendra sans doute de notre époque l’image
d’une indifférence généralisée vis-à-vis de politiques criminelles mêlées à
une
parfaite bonne conscience, symbolisées par le moralisme d’un Kouchner
justifiant
indirectement le cynisme d’un Rumsfeld. Dans l’immédiat, après avoir détruit
et
démembré l’Irak, brisés les gens, l’Iran et la Syrie sont à leurs tours
menacés
par Bush, Blair et aussi Chirac cette fois. N’est-ce pas l’hypocrisie, les
mensonges, et les soumissions qui caractérisent la politique et la
diplomatie ?
Peut-on néanmoins espérer que notre avenir sera moins cruel que notre passé
?Jean Bricmont : Il y a une espèce de course de vitesse entre la
superpuissance
américaine et l’opinion publique mondiale : si cette opinion est
suffisamment
forte, les Etats-Unis vont se trouver dans une situation où l’on peut
espérer
qu’ils seront bloqués. La situation militaire en Irak est le noud de tout ;
tant qu’ils sont immobilisés par la résistance en Irak, je ne les vois pas
attaquer d’autres pays, sauf par des bombardements. Ils peuvent bombarder
l’Iran et la Syrie, mais n’ont pas assez de troupes pour les envahir. En
plus,
il y a l’Amérique latine où la situation n’est pas du tout bonne pour les
Américains. Ce qui est très dangereux, c’est la nouvelle posture du
Pentagone
qui envisage ouvertement l’usage d’armes nucléaires contre des pays qui
n’ont
pas de telles armes. C’est leur nouvelle doctrine. Beaucoup de scientifiques
américains et français se mobilisent contre cette politique. Il faut quand
même
espérer qu’il y ait une réaction, aux États-Unis, qui les empêche d’utiliser
l’arme toute puissante qu’est l’arme nucléaire. Ils ont toujours eu une
double
stratégie : les armes conventionnelles, en quantité absurde, plus l’arme
nucléaire. Ils ont démontré en Irak, à la surprise de beaucoup de gens, que
les
armes conventionnelles n’étaient pas suffisantes. Donc, la seule chose qui
leur
reste, c’est l’arme nucléaire. Il faut empêcher qu’ils l’utilisent ! Pour
convaincre l’opinion, ils disent « on va miniaturiser l’arme nucléaire »,
elle
sera moins dévastatrice, donc son usage sera plus acceptable politiquement.
C’est très dangereux. Il y a bien une course de vitesse entre un militarisme
américain qui risque de ne pas accepter sa défaite, et l’opinion publique
mondiale, y compris une bonne partie de l’opinion publique américaine,
puisqu’il y a une fraction importante de celle-ci qui pense qu’il faut
destituer Bush, ce qui n’est déjà pas si mal.S.C. - Votre livre, qui fait appel à la sensibilité et la compassion que
l’on
doit aux êtres qui n’ont pas la possibilité de vivre dignement, peut
contribuer
à augmenter les chances d’une prise de conscience. Mais peut-on vraiment
espérer
que les dirigeants qui ont fait fausse route vous liront et se raviseront
sous
la pression de l’opinion publique, et particulièrement de leurs électeurs ?Jean Bricmont : Je ne m’attends pas à ce que des dirigeants comme Bush me
lisent. Ils ne lisent d’ailleurs pas beaucoup. Mais je souhaite ouvrir le
débat
dans la gauche, et y recréer l’attitude qu’il y avait dans les mouvements
anticolonialistes du passé, et qui était beaucoup plus lucide sur ce que
sont
nos propres pays. De plus, il faut se rendre compte qu’en Occident, nous
sommes
principalement responsables de la politique des pays occidentaux. Lorsque
nous
voyons des politiques qui ne nous plaisent pas dans le tiers monde, il faut
commencer par en discuter avec les gens qui vivent là-bas, mais avec des
organisations représentatives des masses, pas avec des groupuscules ou des
individus isolés. Il faut essayer de voir si leurs priorités sont les mêmes
que
les nôtres. Par exemple, les gens ordinaires en Amérique latine ne voient
pas
Cuba de la même façon qu’en France, où il est très difficile de dire quelque
chose de gentil sur Cuba, alors que ce pays est assez populaire en Amérique
latine. Quelqu’un comme l’ancien premier ministre de Malaisie, Mohammed
Mahatir, est démonisé chez nous (pour antisémitisme), mais ce qu’il dit est
sans doute relativement populaire dans les pays musulmans (et pas simplement
à
cause de l’antisémitisme). Il y a une extraordinaire bonne conscience
occidentale qui consiste à dire : « ces gens sont des dictateurs, ou des
musulmans fanatiques, des extrémistes, etc. », qui permet d’ignorer et de ne
pas écouter ce que pense une grande partie du genre humain. J’espère que le
mouvement altermondialiste, mettra en place des canaux permettant une
meilleure
compréhension des points de vue du Sud. Pour l’instant, la gauche
occidentale a
tendance à rester dans son coin, tout en ayant très peu d’influence là où
elle
vit et en jouant indirectement le jeu de l’impérialisme en démonisant
l’adversaire , l’autre, l’Arabe, le Russe, le Chinois . au nom de la
démocratie
et des droits de l’homme. Ce dont on est principalement responsable, c’est
de
l’impérialisme de son propre pays. Commençons donc par nous attaquer à cela
et
à nous y attaquer de façon efficace ; les crimes des autres, Saddam,
Milosevic,
Ben Laden, on en parlera après.Bibliographie.
- Jean Bricmont, Impérialisme humanitaire. Droits de l’homme, droit
d’ingérence,
droit du plus fort ?, Aden, Bruxelles, 2005, 18 Euros.
- Jean Bricmont, Régis Debray, A l’ombre des Lumières, Odile Jacob, Paris,
2003
- Jean Bricmont, Alan Sokal, Impostures Intellectuelles, Odile Jacob, Paris,
1997 (2ème édition, Le livre de poche, 1999) - Jean Bricmont, Diana Johnstone, « Les deux faces de la politique
américaine »,
in : L’empire en guerre (coll.), Le temps des cerises, Paris, 2001 - « Folies et raisons d’un processus de dénigrement, Lire Noam Chomsky en
France
», postface in : Noam Chomsky, De la guerre comme politique étrangère des
Etats-Unis, Agone, Marseille, 2002 - « L’espoir change-t-il de camp ? » in : Mourir pour MacDo en Irak (coll.),
Aden,
Bruxelles, 2004
- Préface in : Norman Finkelstein, Tuer l’espoir : introduction au conflit
Israélo-Palestinien, Aden, Bruxelles, 2003
- « Donner un contenu concret à la notion de classe », préface in : Geoffrey
Geuens, Tous pouvoirs confondus, EPO, Bruxelles, 2003
- « La fin de la « fin de l’histoire » », et « Questions aux "défenseurs des
droits de l’homme« », in : 11 septembre 2001, La fin de la »fin de
l’histoire"
(coll.), Aden, Bruxelles, 2001.
- Jean Bricmont, Impérialisme humanitaire. Droits de l’homme, droit
-
-
> Aide humanitaire : éléments de débat Article pour la revue Sciences Humaines, Hors série, La société française, sept 0526 septembre 2005
Article pour la revue Sciences Humaines, Hors série, La société française, sept 05
Bénédicte Havard Duclos & Sandrine Nicourd
Pourquoi s’engager dans des associations de solidarité ?
Chaque année, des milliers de bénévoles distribuent des repas, récoltent des fonds pour des causes humanitaires ; d’autres militent pour l’accès aux droits de ceux qui n’en ont plus, font pression sur les pouvoirs publics pour faire obtenir des logements à des familles mal-logées ; d’autres encore enseignent le français à des migrants ou accompagnent des enfants dans leur travail scolaire…
Malgré cette diversité, est-il possible de mettre à jour des ressorts communs de l’engagement ? Pourquoi, au nom de quoi et de qui s’engagent les bénévoles et militants de la solidarité ? Comment leurs engagements se maintiennent-ils ou non dans la durée ? Les questions sont anciennes et les sciences sociales se sont attelées à y répondre depuis longtemps déjà. Elles montrent que motifs sociaux, matériels, identitaires, symboliques et idéologiques se combinent en permanence, que motivations altruistes et égoïstes sont toujours imbriquées. L’engagement de solidarité n’est réductible ni aux « intérêts » (rétributions, gratifications), ni aux normes héritées des socialisations politiques et du milieu (habitus de combat, sensibilités et cultures politiques)[1].
S’engager est toujours aussi être engagé, donc tenu et retenu par des collectifs et des contextes normatifs[2]. Ainsi, loin d’être seulement la conséquence d’un choix personnel, un engagement est le résultat d’un processus d’ajustement, souvent fragile, entre une histoire sociale personnelle et une association qui le suscite et contribue à le justifier dans des conditions sociales et historiques particulières[3]. On ne peut pas à proprement parler de mutation de l’engagement associatif. Hier comme aujourd’hui, cette activité produit du sens. Si les attentes individuelles se maintiennent, les contextes de leur mise en œuvre et de leur satisfaction, se sont cependant modifiés, donnant parfois l’impression d’un fort renouvellement des pratiques associatives de solidarité.
Des engagements apolitiques ?
Comme dans les années cinquante, les bénévoles et militants s’engagent aujourd’hui, parce qu’ils sentent que leur action est légitime : elle leur permet d’être du « bon côté de l’histoire », au cœur des enjeux de société, c’est-à-dire conforme aux normes valorisées dans un milieu, une époque[4]. Quand la crise du logement devient aiguë, que la « fracture sociale » apparaît comme une cause nationale, que les médias mettent en avant la figure charismatique de l’abbé Pierre, l’association Droit Au Logement s’impose par exemple comme un lieu où il semble normal de militer.
La multiplication des offres d’engagement (forte augmentation du nombre d’associations agissant pour la solidarité[5]), contribue au brouillage de repères normatifs et idéologiques anciens. Au nom de quoi un bénévole choisira t-il de s’engager au Secours populaire, au Secours Catholique ou encore aux restos du cœur ? La revendication d’une nouveauté des pratiques, des causes et des formes d’engagement conduit acteurs et associations à récuser les engagements passés, réécrits dans des termes disqualifiés. On prétend aujourd’hui ne plus se soumettre mécaniquement à la discipline d’un parti ou d’une église mais agir en en réseaux, dans des lieux réputés souples et démocratiques, peu soumis à des appareils et à des bureaucraties[6]. Les bénévoles et militants témoignent massivement vouloir agir localement avec un souci d’efficacité et de pragmatisme, plus qu’au service d’une organisation ou au nom d’une idéologie.
Les associations sont alors dans une situation paradoxale : pour être attractives, elles reprennent ce discours d’un engagement « moderne ». Elles se prévalent de l’apolitisme, de la neutralité, du consensus. Elles valorisent l’action autonome et pragmatique. Et ce, alors même que la transmission de l’histoire des engagements et le positionnement dans le champ politique restent des cadres indispensables aux actions.
Une résurgence de la philanthropie ?
Les personnes s’engagent et restent engagées également parce qu’elles ont la conviction que leur action est utile pour ceux au nom de qui, avec qui elles s’impliquent. Dans les associations qui mettent au cœur de leur projet, explicite ou implicite, la solidarité, s’engager c’est ainsi trouver le moyen de faire reculer la misère et l’injustice, de « résoudre » la question sociale ou d’en maîtriser les conséquences dans ses manifestations les plus concrètes : surendettement, non maîtrise de la langue, vie dans des logements insalubres, difficultés scolaires…
Les associations doivent ainsi convaincre les acteurs de leur utilité sociale. Derrière le même mot de solidarité, les associations promeuvent différentes conceptions. En prescrivant des normes d’actions (tolérance plus ou moins grande à l’égard des pratiques d’assistance, appel à l’éducation individuelle ou à la mobilisation collective), des manières de s’adresser aux destinataires de l’action (tutoiement ou vouvoiement, distance ou intimité partagée, rudoiement ou politesse…) plus encore que des « lignes idéologiques », elles défendent respectivement trois formes de solidarité : la réparation, l’éducation ou la conquête de droits.
La tension entre court et long terme, entre assistance immédiate et promotion d’une cause, entre adaptation à l’urgence et expérimentation sociale, semble être récurrente dans l’histoire de l’engagement de solidarité. Les normes pragmatiques privilégiant l’efficacité d’actions très locales tirent leur puissance de conviction de la multiplication des situations d’urgence sociale, mais aussi des contraintes économiques qui pèsent sur les associations, de plus en plus subventionnées sur des projets et des actions ponctuelles. Ainsi, lorsque des actions militantes entendent promouvoir l’émancipation d’individus ou de collectifs par la conquête de droits, ces efforts se voient absorbés par des logiques d’assistance et de survie. Les visions égalitaires de la solidarité doivent alors s’accommoder avec des dispositifs structurellement inégalitaires. Les leaders aptes à créer de la transmission politique, sont quant à eux souvent happés par des logiques gestionnaires.
Faire de son engagement un travail
Les bénévoles et militants de la solidarité s’engagent pour être utiles à d’autres, en conformité avec les normes de leur temps, au nom de valeurs ou de principes qu’ils veulent défendre. Dans les faits, l’action associative permet aussi des rencontres, l’accès à des espaces de sociabilité et de convivialité, caractérisés par une forme d’entre soi en même temps que d’ouverture à d’autres univers sociaux. Elle permet d’avoir une activité sociale, hors de chez soi. Ces attentes de rétributions et de gratifications matérielles et sociales prennent aujourd’hui un sens très particulier. En effet, si les espoirs de professionnalisation, d’acquisition de compétences transférables ailleurs sur le marché du travail ont toujours existé (l’engagement syndical permettait par exemple à certains d’échapper au quotidien de l’usine), la crise économique et le chômage ont rendu ces attentes d’opportunités professionnelles particulièrement présentes. Pour une grande partie des jeunes bénévoles, l’espoir d’une insertion professionnelle s’est accrue ; pour d’autres, retirés du marché du travail (retraités, femmes au foyer, chômeurs), le fait que l’engagement soit une activité sociale comparable à un travail, est très mobilisateur. Sous ces formes, bénévolat et salariat sont de plus en plus étroitement connectés, les carrières d’engagement souvent indissociables de carrières de travail[7].
Des engagements liés à des attentes identitaires
Il n’en reste pas moins que l’engagement se maintient quand il fait sens pour un individu dans sa propre histoire. Le choix du lieu et du type d’actions investies a souvent partie liée avec des événements biographiques. Des épisodes de la grande Histoire (guerres, événements historiques) ou des histoires familiales réappropriées personnellement (parcours migratoire, promotion ou déclassement social, scolarité avortée, revanche à prendre sur des souffrances intimes ou sociales…) nourrissent les interrogations sur le sens et la place des individus dans le monde. Les associations fournissent, de fait, des façons de dire les sources collectives de souffrance et d’injustice, d’identifier des adversaires, des alliés. Elles donnent l’occasion de rencontrer des personnes charismatiques. Elles apportent ainsi de multiples ressources identitaires, de l’estime de soi à la fidélité aux valeurs reçues en héritage, en passant par la requalification des blessures que l’on a subies. L’adhésion au Parti Communiste a ainsi été pour des générations de militants une réponse à des questions d’identité sociale : elle permettait de s’affranchir de son milieu, de sa classe tout en lui restant fidèle, de dilater les possibles et de sortir de son monde, sans le trahir[8]. Dans les associations de solidarité où les cadres idéologiques sont voulus moins explicites, les différentes interactions (entre pairs, avec les leaders, avec les personnes aidées) alimentent les constructions identitaires.
Pour comprendre pourquoi des bénévoles et militants s’engagent et restent engagés, il faut donc regarder comment ces individus sont tenus/retenus par l’organisation associative et par leur propre trajectoire. Quand leur participation est porteuse de sens dans les quatre registres que nous avons successivement abordés, soit la légitimité de leur action, le sentiment d’une utilité sociale, la satisfaction de leurs attentes socioprofessionnelles et les rétributions identitaires, alors ils restent fidèles et dévoués à leurs organisations, y compris de manière sacrificielle. Quand seul un ou quelques-uns de ces fils tiennent les individus, ils seront plus enclins à la défection. En dénouant le faisceau des raisons qui expliquent l’engagement de certains de nos contemporains, on peut comprendre en creux pourquoi la fidélité associative est le résultat d’une alchimie toujours fragile, pourquoi certains secteurs traditionnels de l’engagement vivent la période contemporaine sur le mode négatif de la crise quand d’autres le vivent sous le mode, plus positif, du renouvellement.
[1] D. Gaxie, « Economie des partis et rétributions du militantisme », Revue Française de sciences politiques, 27-1, 1977. P.Bourdieu, La distinction, critique du jugement social, Ed Minuit, 1979.
[2] H. Becker, « Notes on the concept of commitment », Sociological Work, Aldine Publishing Cy, 1970.
[3] O. Fillieule, « Propositions pour une analyse processuelle de l’engagement individuel », Revue Française de sciences politiques, 51/1-2, 2001 ; P. Dauvin, J. Siméant & C.A.H.I.E.R, Le travail humanitaire. Les acteurs des ONG, du siège au terrain, Presses de Sciences Po, 2002 ; A. Collovald, L’humanitaire ou le management des dévouements, PUR, 2003 ; B. Havard Duclos, S. Nicourd, Pourquoi s’engager ? Bénévoles et militants dans les associations de solidarité, Payot, 2005.
[4] M. Barthélémy, Associations : un nouvel âge de la participation, Presses de Sciences Po, 2000.
[5] Malgré les difficultés de repérage du bénévolat associatif de solidarité, l’INSEE estime que 13 millions de Français de plus de 15 ans sont bénévoles dans le cadre d’organisations. 15, 5% des bénévoles s’adonnent à leurs activités dans le domaine de l’action sociale, sanitaire et humanitaire, autant dans le domaine de « la défense des droits », qui regroupe aussi pour partie des militants de solidarité. L. Prouteau et F-C Wolff, « Donner de son temps : les bénévoles dans la vie associative. » Economie et statistiques, n°372, 2004. M. Barthélemy souligne de son côté que le nombre d’associations est passé de 10 000 en 1960 à 1 000 000 aujourd’hui.
[6] J. Ion, S. Franguiadakis, P. Viot, Militer aujourd’hui, Autrement, 2005.
[7] M. Simonet-Cusset, « Penser le bénévolat comme travail pour repenser la sociologie du travail » in D. Ferrand-Bechmann (dir), Les bénévoles et leurs associations, L’harmattan, 2004.
[8] B. Pudal, « Les dirigeants communistes. Du ‘fils du peuple’ à l’instituteur des masses’ », Actes de la Recherche en Sciences Sociales, 71-72, 1988.
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CONFERENCE ORGANISEE PAR L’ASSOCIATION POUR LA DEFENSE DU DROIT INTERNATIONAL HUMANITAIRE (ADIF)13 septembre 2005
CONFERENCE ORGANISEE PAR L’ASSOCIATION POUR LA DEFENSE DU DROIT INTERNATIONAL HUMANITAIRE (ADIF)
Droit International Humanitaire et impunité des États puissants, le cas des États-Unis
22, 23 et 24 septembrePalais Bourbon
(Métro Assemblée Nationale ou Invalides)À l’invitation de Patrick Braouezec
Député de Seine-Saint-DenisPrésidents d’honneur
Theo Van Boven et Pierre Vidal-NaquetPrésidents de la conférence Nils Andersson, Daniel Iagolnitzer
PROGRAMME
22 septembre 2005
D’Hiroshima à Guantanamo, un constat d’impunité
Palais Bourbon, salle 6217, 126, Rue de l’Université, 75007 Paris08.30 Accueil
Ouverture de la conférence
09,15 Daniel Iagolnitzer, physicien, président de l’ADIFPour l’abolition des armes nucléaires
09.45 Tadatoshi Akiba, Japon, maire d’Hiroshima
DébatArmes atomiques et armes chimiques (Hiroshima, VietnamŠ)
10,45 Abraham Behar, France, ex vice-président de l’Association des médecins pour la prévention de la guerre nucléaire (IPPNV, Prix Nobel de la Paix)
11.10 Monique Chemillier-Gendreau, France, professeure de droit et de sciences politiques
11.35 Ayse Erzan , Turquie, professeure de physique, Membre de l’Académie des sciences
Débat
12.30 Fin de la sessionLes conséquences humaines de politiques interventionnistes
14,00 Samir Amin, Égypte, économiste
14.25 Jan Myrdal, Suède, écrivain et essayiste
14.50 Milquella Matéo Perez, Rép. Dominicaine, professeure d’économie
DébatDe la première à la seconde guerre d’Irak
15,40 Michael Parenti, Etats-Unis, professeur de sciences politiques
Débat (pause)Le droit internationale humanitaire en question
16.45 Amy Bartholomew, Canada, professeure de droit
17.10 Philip Grant, Suisse, avocat, président de TRIAL (Track Impunity Always)
17.35 Lee Roberts Dr, Etats-Unis, Center for Intenational Emergency Disaster andRefugee Studies, collaborateur à la revue « The Lancet »
DébatLa stratégie du « conflit des civilisations »
18.20 Pascal Boniface, France, directeur de l’Institut de Relations Internationales et
Stratégique (IRIS)
19.00 Fin de la session23 septembre 2005
Le droit humanitaire, des valeurs juridiques et morales à défendre
Immeuble Jacques Chaban-Delmas , salle Victor Hugo, 101, Rue de l’Université, 75007 Paris08.30 Accueil
Allocution d’accueil de la conférence
09.15 Patrick Braouzec, France, députéViolation de la Constitution ou respect du droit ?
09.45 Ramsey Clark, Etats-Unis, ancien Ministre de la justice
DébatLa réforme de l’ONU et le droit international humanitaire
11,00 Stephane Hessel, France, ambassadeur
DébatLa voix des victimes
12.00 Nadia Mac Caffrey et Nicole Dreyfus
12.30 Fin de la sessionLa guerre continue : le droit international humanitaire nié
14.00 William Blum, Etats-Unis, auteur d’essais sur la politique extérieure des Etats-Unis
DébatLutte contre le terrorisme et droit humanitaire
15.00 Sidiki Kaba, Sénégal, président de la Fédération internationale des droits de l’homme
Guantanamo, le droit international humanitaire bafoué
15.25 Geneviève Sevrin, France, présidente d’Amnesty International, section française
Les civiles principales victimes des guerres
15.50 Françoise Jeanson, France, présidente de Médecins du monde
Débat (Pause)Guantanamo, le droit international humanitaire bafoué
16.45 Dr Najeeb Al Nauimi, Qatar, ancien ministre de la justice
DébatLes faces cachées d’une guerre continue
17,30 Ignacio Ramonet, France, directeur du Monde Diplomatique
Débat
19.00 Fin de la session24 septembre 2005,
Exiger l’application du droit international humanitaire et dénoncer toute impunité
Palais Bourbon, salle 6217, 126, Rue de l’Université, 75007 Paris08.30 Accueil
Les ONG, fer de lance des opinions publiques
09.15 Catherine Coquio, France, professeur de littérature. présidente de l’Association Internationale de Recherche sur les Crimes contre l’Humanité et les Génocides
09.40 Jacques Le Dauphin, France, directeur de l’Institut de Documentation et de Recherches pour la Paix
10.05 Antoine Bernard, France, directeur de la Fédération Internationale des Droits de l’homme
DébatL’enjeu : application ou révision du droit humanitaire international
10,45 Nuri Albala, France, avocat
11.10 Karen Parker, Etats-Unis, avocate, Association of Humanitarian Lawyers
11.35 Robert Charvin, France, doyen, professeur de droit international
Débat
12.30 Fin de la sessionIngérence ou droit humanitaire pour une autre vision politique
14,00 Jean Bricmont, Belgique, professeur de physique
14.25 Pedro García-Bilbao. Espagne. Dr. en sociologie
14.50 Rudolf El Kareh, Liban, professeur, sociologue et politologue
Débat (Pause)Une ère de la négation ou un monde à imaginer ?
15.45 Corinne Kumar, Inde, coordinatrice internationale du Tribunal mondial sur la guerre comme crime. El Tailer Internationale
Débat`16.30 Clôture de la conférence
Nils Andersson, journaliste, co-président de la conférence
17.00 Fin des travauxLes travaux de la conférence bénéficient d’une traduction simultanée français/anglais
Le programme est susceptible de modifications en raison des obligations des intervenants.
Les intertitres sont de la responsabilité de l’ADIF, le titre des communications de chaque intervenant sera indiqué sur le programme définitif.La conférence est organisée avec le parrainage de la Fondations Daniel Lagolnitzer (sous égide de la Fondation de France)
Informations pratiques
Lieux de la conférence
Les 22 et 24, salle 6217, 126, Palais Bourbon, Rue de l’Université, 75007 Paris
Le 23, Immeuble Jacques Chaban-Delmas , salle Victor Hugo, 101, Rue de l’Université, 75007 Paris (Métro Assemblée Nationale ou Invalides)Horaires de la conférence
Accueil : 08h30
Interventions et débats de 09h15 à 12h30 et de 14h00 à 19h00 (17h00, le 24)Important !
La participation à la conférence est libre de frais
mais l’inscription est obligatoire pour l’accès au Palais Bourbon.
Il est donc nécessaire d’effectuer votre demande d’inscription avant le 19 septembre 2005 sur le site de l’ADIF : adifinfo.com, ou par mail : andenils noos.fr ou par téléphone, 01 45 45 49 66N’oubliez pas de vous munir d’une pièce d’identité, elle vous sera demandée à l’entrée.
* * *
Autre événement à l’initiative de l’ADIF
Symposium scientifique international
20 et 21 septembre 2005, École Normale Supérieure, 45, Rue d’Ulm, Paris Ve
Science et droit international humanitaire :
La science au service de la guerre, la responsabilité des scientifiquesProgramme et inscription sur le site adifinfo.com
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Il faut sauver la planète ! :trois idéalistes dans l’enfer humanitaire7 août 2005, par Transmis par Yann Fiévet Attac Consommation
Il faut sauver la planète ! :
trois idéalistes dans l’enfer humanitaire
Cain, Kenneth
Postlewait, Heidi
Thomson, Andrew
Editions Payot Essais (14/05/2005)
22.00 eurosVoici la formidable histoire de trois jeunes gens qui voulaient sauver
la planète ; deux hommes et une femme qui ne se connaissaient pas et
vont devenir amis au fil de leur travail pour l’ONU au Cambodge, en
Somalie, à Haïti, au Liberia, en Bosnie, au Rwanda, bref, là où la
vie, dans les années 1990, était un enfer.Leur témoignage montre une réalité dure, violente, souvent
décourageante : celle de l’humanitaire et des opérations de maintien
de la paix, où le sexe est parfois la seule soupape face à l’horreur,
et où l’hypocrisie, l’incompétence et la corruption peuvent mettre à
bas les meilleures volontés.« Nous avons risqué notre vie et vu nos amis mourir, tout cela au nom
de l’humanitaire. Nous avons le droit de dire la vérité. » Très
critique envers l’ONU, dont les responsables ont, dès sa parution,
fait subir aux auteurs des mesures de rétorsion, ce livre est pourtant
l’un des rares dans lesquels tous ceux qui travaillent sur le terrain
peuvent dire qu’ils se reconnaissent.http://www.sauramps.com/rubrique.php3?id_rubrique=4485&I=9782228899772&F=N&choix=fiche
ACTION CONSOMMATION - 21ter rue Voltaire - 75011 Paris
www.actionconsommation.org
fr
Alternatives partout et maintenant
Solidarités
Réflexions, débats, brèves
?
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OPML
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