Voici la 7ème édition de l’atlas des sites terrestres et aquatiques pollués par les PCB. Pour pallier aux éventuelles insuffisances et aux fragmentations des sources officielles, les archives de Robin des Bois et les alertes transmises par des lecteurs des atlas antérieurs sont aussi mobilisées.
Les PCB (PolyChloroBiphényles), notamment ceux qui sont apparentés aux dioxines – les dioxin-like – sont des cancérogènes probables. Ils sont reconnus en tant que perturbateurs endocriniens, ils peuvent générer des malformations fœtales, un affaiblissement des systèmes immunitaires, des troubles du cycle de reproduction, de la croissance et du système nerveux. Ces effets affectent toutes les espèces animales, y compris l’espèce humaine et sont en synergie avec ceux d’autres polluants persistants.
L’atlas PCB de Robin des Bois est illustré de cartographies et de photographies. Les sites pollués terrestres sont répartis en 4 catégories :
– site-production les sites de production des PCB et des appareils contenant des PCB
– site-stockage les sites de stockage, de récupération, de maintenance, de vidange ou de retraitement de transformateurs et d’autres équipements électriques ou huiles contaminés aux PCB
– contaminés les sols, sous-sols, remblais ou eaux souterraines contaminés aux PCB par des activités industrielles éteintes ou existantes et des accidents de transport
– pillage les scènes de pillage de transformateurs électriques aux PCB
L’Atlas présente les sites pollués bassin par bassin : Artois-Picardie, Seine-Normandie, Rhin-Meuse, Rhône-Méditerranée-Corse, Loire-Bretagne, Adour-Garonne et Outre-Mer. Dans les territoires ultramarins, les échantillonnages et la quantification des PCB dans les milieux aquatiques et terrestres sont très insuffisants. En même temps, les conditions d’exploitation, d’entreposage et d’exportation pour élimination des appareils contenant des PCB sont soumis à des aléas climatiques extrêmes et à des complexités administratives.
Cette 7ème édition révèle une évolution négative. En juillet 2011, 437 sites terrestres pollués étaient comptabilisés. En avril 2013 il y en a 550.
De même, la comparaison des cartographies des milieux aquatiques contaminés de juillet 2011 et d’avril 2013 montrent une extension. Cette extension sera encore plus spectaculaire quand les préfets du Haut-Rhin, du Bas-Rhin et de la Lorraine auront suivi le récent avis du groupe PCB de l’ANSES (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail) et pris des arrêtés réglementant les activités de pêche sur la Meuse, l’ensemble de la Moselle, le Grand Canal d’Alsace et le Rhin. La Suisse, la France, l’Allemagne, la Belgique et les Pays-Bas sont à la fois les victimes de la pollution et les responsables. Les rejets des grands fleuves d’Europe du Nord participent à l’empoisonnement des ours polaires, des mammifères marins et des peuples autochtones de l’Arctique.
Il y a une corrélation géographique évidente entre les sites terrestres et les milieux aquatiques pollués par les PCB.
L’imprégnation de l’environnement par un produit qui n’est plus fabriqué en France depuis 25 ans s’aggrave. La dynamique des PCB est circulaire. Grâce à l’effet « sauterelle », les PCB reviennent par la fenêtre alors qu’on les croyait enchaînés dans les oubliettes. Les PCB traînent dans les sols. Ils prennent l’air et ils prennent l’eau comme moyens de transport.
Sous les noms commerciaux de pyralène, phénoclor et électrophényl ou sous le terme générique d’askarel, la France a produit au minimum 150.000 tonnes de PCB. La réglementation européenne interdit la consommation de certaines denrées alimentaires et de la chair de poisson à partir de quelques milliardièmes de grammes par litre ou par kilo.
L’ANSES en est réduite dans ses recommandations nutritionnelles à un rôle de Bocuse chimique portant une toque orange, un peu de PCB par ci, un zeste de mercure par là et j’assaisonne avec des Oméga 3. Les consommateurs sont priés de s’adapter à la fatalité des PCB. Déjà, le règlement de la Commission Européenne accorde des dérogations permettant de mettre sur le marché des poissons qui dépassent les teneurs maximales autorisées. C’est le cas de la Finlande et de la Suède pour les poissons de la mer Baltique et de la Lettonie pour les saumons sauvages.
Les plans d’élimination des PCB se succèdent et se concentrent sur les transformateurs, les condensateurs électriques et les radiateurs à bain d’huile. C’est omettre que la moitié des PCB produits dans le monde a été utilisée dans des applications innombrables et dispersives : linoléum, encaustiques, résines, peintures, matériaux de construction, lubrifiants, asphaltes, plastiques, pesticides, textiles, caoutchoucs, adhésifs, éclairages. Ignifuge, antirouille, stabilisant, liant et plastifiant, les PCB entre 1930 et 1980 servaient à tout et partout. Ils ont accompagné et sécurisé l’industrie et l’habitat sur tous les continents. En ce sens, les PCB sont les cousins de l’amiante.
En conséquence les sites pollués terrestres ne sont pas les seuls émetteurs. Doivent aussi être pris en compte les rejets des stations d’épuration, l’épandage des boues de stations d’épuration, l’immersion des boues de dragage, la combustion des bois traités, les activités d’élimination des VHU et des DEEE, la démolition des bâtiments, les rejets des incinérateurs et des crématoriums, des papeteries, des cimenteries, des procédés thermiques de l’industrie métallurgique et des sites de régénération d’huiles noires.
La Convention de Stockholm sur les Polluants Organiques Persistants appelle les Etats-membres à prendre les mesures appropriées pour que tous les déchets contenant des PCB soient détruits ou irréversiblement transformés. La France en est signataire. Elle appelle aussi à éliminer les équipements contenant plus de 50 ml de PCB ou plus de 0,005% : les câbles électriques, les joints d’étanchéité, les équipements recouverts de peintures aux PCB et l’échéance de 2028 sont cités.
Après la découverte de la contamination des troupeaux autour de l’usine de retraitement des transformateurs Aprochim en Mayenne, le Ministère de l’Ecologie a décidé de mieux connaître les rejets atmosphériques en PCB des autres entreprises spécialisées et les teneurs dans les produits agricoles de proximité. Les éventuelles contaminations des eaux de surface et des eaux souterraines autour ou au-dessous des sites de transit et de stockage de transformateurs sont aussi recherchées. Les émissions atmosphériques des installations mobiles de décontamination font aussi l’objet d’une attention particulière. Les premiers résultats devraient être connus dans les semaines qui viennent.
D’autres efforts s’imposent :
– la reconstitution et l’élargissement du périmètre de la commission d’évaluation et de suivi du plan national de décontamination et d’élimination des appareils contenant des PCB. Cette commission a été dissoute en 2007 et n’a pas participé à l’élaboration du nouveau plan d’élimination des appareils électriques contenant des PCB à une concentration de 50 à 500 ppm (mg/kg)
– la révision stricte et l’application des seuils en PCB autorisant l’épandage des boues de stations d’épuration sur les parcelles agricoles et le rejet en mer de boues de dragage
– l’enlèvement sans délai de tous les transformateurs et condensateurs électriques dans les usines désaffectées et les immeubles voués à la destruction
– le contrôle PCB des aliments importés pour les animaux d’élevage y compris les poissons
– la conformité à toutes les prescriptions et recommandations de la Convention de Stockholm
– le diagnostic PCB des bâtiments avant démolition et l’extraction préalable des matériaux contaminés
– la coopération internationale pour la gestion du risque PCB dans le Rhin, le Rhône et la Meuse, l’Escaut.
Accéder directement :
Atlas des sites terrestres pollués aux PCB - Septième édition - Avril 2013
Atlas des sites aquatiques pollués aux PCB - Mise à jour avril 2013