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Jacques Berthelot : Propriété intellectuelle dans le CETA : indications géographiques

8 décembre 2014, 07:21, par Yonne Lautre

Bien que la Commission européenne se flatte d’avoir imposé ses indications géographiques pour la première fois à une grande échelle dans le CETA, le Canada a réussi à sauvegarder l’utilisation de ses marques de produits. Ainsi, selon le Canada, :
À l’heure actuelle, le Canada reconnaît un certain nombre d’indications géographiques pour les vins et les spiritueux de l’UE, comme Cognac et Bordeaux
Le Canada a accepté diverses mesures pour répondre aux demandes de l’UE concernant 179 termes liés aux aliments et à la bière
Des droits limités liés aux indications géographiques ont été accordés à l’UE pour les termes suivants : asiago, feta, fontina, gorgonzola et munster
mais cela n’empêchera pas les utilisateurs actuels de ces termes de continuer à les utiliser au Canada
les futurs utilisateurs ne pourront utiliser ces termes que s’ils sont accompagnés d’expressions comme « sorte », « type », « style », « imitation » ou autre expression similaire
Mais :
Certaines indications géographiques de l’UE étaient protégées à condition qu’elles ne nuisent pas à la capacité des producteurs d’utiliser des termes précis en anglais et en français qui sont couramment employés au Canada
Une protection est prévue pour les indications géographiques sans porter préjudice à la validité des marques de commerce canadiennes existantes
Un espace est préservé pour les détenteurs de marques de commerce canadiennes et pour les utilisateurs de noms courants en anglais et en français pour les produits alimentaires
les termes suivants peuvent continuer à être utilisés sur le marché canadien, dans les deux langues officielles, et ce, peu importe l’origine du produit : orange Valencia, jambon forêt noire, bacon tyrolien, parmesan, bière bavaroise, bière de Munich
les producteurs canadiens pourraient utiliser les équivalents en anglais et en français pour le jambon forêt noire, mais pas le terme allemand (Schwarzwaelder Schinken)
Le Canada conserve le droit d’utiliser le nom usuel d’une variété végétale ou d’une race animale
par exemple, les producteurs peuvent vendre des olives de Kalamata et utiliser le nom de cette variété sur l’emballage
Le Canada conserve le droit d’utiliser des éléments de termes comportant plusieurs parties, par exemple :
« brie de Meaux » sera protégé, mais le terme brie peut être utilisé seul
« gouda de Hollande » sera protégé, mais le terme gouda peut être utilisé seul
« édam de Hollande » sera protégé, mais le terme édam peut être utilisé seul
« mortadelle de Bologne » sera protégé, mais les termes mortadelle et Bologne peuvent être utilisés séparément
Le Canada n’a pas accepté de protéger le terme français « noix de Grenoble » (en anglais, walnut), ce qui signifie qu’il est toujours possible d’utiliser ce terme au Canada
La bière Budweiser : le Canada ne protégera pas l’indication géographique Budejovicke, afin d’éviter tout conflit potentiel avec la marque de commerce Budweiser
Des consultations ont été menées auprès d’intervenants, y compris des réunions individuelles avec des détenteurs de marques de commerce
Au total l’incidence économique pour le Canada sera limitée
L’application des indications géographiques au sein du marché canadien est considérée comme une affaire privée devant être réglée devant les tribunaux
Sur le fond, les indications géographiques, comme les droits de propriété intellectuelle en général, ne doivent pas prévaloir sur les objectifs de développement durable et notamment sur le droit et même l’encouragement des populations à consommer local et à privilégier en conséquences les produits locaux et les modes de production respectueux de l’environnement et des conditions sociales de production.

Un bon exemple des limites des indications géographiques (IG) concerne les spiritueux produits à partir de céréales, dont le whisky, la vodka, le gin et le genièvre mais aucune IG de ces spiritueux issus des céréales ne précise que les céréales doivent avoir été produites dans l’aire géographique de production du spiritueux (Règlement n° 110/2008 du Parlement européen et du Conseil du 15 janvier 20081). Et la définition de l’IG Scotch whisky implique seulement que le whisky a été distillé en Ecosse avec de l’eau d’Ecosse, mais pas nécessairement avec des céréales écossaises ou d’ailleurs européennes. Il peut donc être produit à partir de maïs OGM importé des USA ou d’Amérique du Sud, du moins pour le Single Grain Scotch Whisky ou le Blended Grain Scotch Whisky, même si le Single Malt Scotch Whisky doit être produit à partir de malt d’orge exclusivement mais qui peut lui-même être importé.

(1) http://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=OJ:L:2008:039:0016:0054:fr:PDF

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